Interview Jordan Chan

Des films d'action aux drames, de gros budgets à des films d'auteur, Jordan Chan a déjà une filmographie variée et intéressante à son actif. François et Vivian ont pu le rencontrer pour parler des étapes marquantes de sa carrière et son actualité.


Ses débuts
  Comment a été votre expérience avec le studio UFO ?
  Ma carrière a commencé avec UFO, mon premier film Twenty Something était avec eux. J’étais un danseur à ce moment-là et il cherchait du sang neuf, en ce temps je ne savais même pas comment jouer, bien qu’après le film, j’ai reçu un award du meilleur second rôle masculin et du coup, j’ai enchaîné sur 3-4 films avec eux.

Après, d’autres gens m’ont proposé de faire d’autres films. En général les films HK sont conçus réalisés dans des délais très courts qui vont de deux semaines à un mois. UFO portait plus d’attention aux scripts et ils prenaient généralement plus de temps. Hui Yuen était mon manager en ce temps-là et bien qu’on avait pas de contrats, tous mes films étaient avec UFO.

  La série Young & Dangerous vous a rendu très célèbre. Comment avez-vous vécu cette popularité ?
  Je ne me suis pas vraiment reposé sur ma popularité. Si j’ai du travail, je le fais de mon mieux. Parfois je ne sais pas si je réussirais certaines choses. Le film était très populaire en Chine et à Hong-Kong en son temps et cela allait en s’accroissant avec les VCDs pirates. Une autre série qui m’a bien fait connaître, c’est la série télé Duke Of Mount Deer. Après ça, les gens savaient qui Jordan Chan était.
  Votre personnage de Chicken est plus humain que celui d’Ekin. L'avez-vous beaucoup modifié au cours de la série Young & Dangerous ?
 
Tout au long de la série, Chicken doit être derrière le personnage d’Ho-Nam. Dans le premier, on avait tous les cheveux longs, dans le deuxième j’étais chauve, dans le troisième j’avais un béret, dans le quatrième j’étais plus riche et je commençais à porter des costards-cravates et ainsi de suite pour le 5, le 6… C’est comme Wong Fei-Hung, on ne peut pas changer en cours de route et devenir un méchant comme Shek Kin (ndr : ancien acteur du temps de la Cathay). Le succès de la série est dû à 70-80% à Manfred Wong et Andrew Lau, les acteurs ne comptent que pour 10-20%. On avait un consultant (ndr : Frankie Ng Chi-Hung) et il nous disait que ce n’était pas la façon dont les gangsters parlaient, etc… A Hong-Kong, il y a la bédé Goo Wat-Jai (ndr : Teddy Boy est le titre officiel de cette bédé) et je ne l’avais jamais lue mais après avoir commencé la série, je n’ai plus su m’en passer. Si on avait voulu être plus réaliste on aurait dû mettre des gros mots mais si on l’avait fait, la série aurait été classée Cat3 (ndr : interdit aux moins de 18 ans) et ça aurait diminuer la fréquentation dans les salles. Parmi les mauvaises personnes au sein des triades, on était les bons.
  Le film Those Were The Days était plus romantique. Vous préférez la série Young & Dangerous ou Those Were The Days?
  J’aime Those Were The Days parce que ça parle de la famille, de l’existence et de la vie amoureuse de Chicken. Dans Young & Dangerous tout est basé sur Ekin qui est le héros et il n’y avait pas de place pour développer le personnage de Chicken. L’assistant réalisateur des Young & Dangerous était le réalisateur de Those Were The Days et il accordé beaucoup plus de liberté et de substance à mon personnage. Mais si je dois parler du tournage en lui-même, je dirais que je préfère les Young & Dangerous parce qu’on était très nombreux sur le plateau et c’était fun.
Ses films récents
  Diva Ah Hey
  Jordan fait semblant de ronfler
  Vous n’avez pas aimé ?
  Je suis fatigué. Ekin m’avait dit que Charlene criait beaucoup et était très bruyante.
  Pourquoi vous ressentez ça comme ça ?
  J’ai préparé mon concert pendant 3 mois non-stop et ensuite j’ai fait mes deux jours de concert. Habituellement après un concert on va se relaxer et prendre des vacances pendant une semaine comme ça on peut avoir un peu de soleil, faire du bronzage, de la lecture et se relaxer. Mais ce film a commencé un jour après mon concert, c’était beaucoup trop proche, trop tôt. S'il avait commencé une semaine après, j’aurais été en meilleure forme. Je me retrouvais à manger un plat tout préparé la nuit sur le plateau alors que la veille je passais un grand moment à faire mon concert du mieux possible.
  Vous trouvez le film intéressant ?
  C’est un film intéressant sur une fille comme les autres qui devient une popstar. Le film a pris juste un peu plus de 10 jours pour être achevé.
  Est-ce que les jeunes stars que sont Charlene Choi et Shawn Yue sont venues vous poser des questions vu que vous étiez le plus expérimenté sur le plateau ?
  Non, je n’oserais pas. Charlene aime beaucoup jouer et c’est une fille très mignonne. Hors-caméra, elle est très exubérante, je suis déjà très bavard et ai tendance à parler non-stop mais elle est encore pire.

En ce qui concerne Shaw Yue, je m’entends bien avec lui mais il a besoin de plus de temps pour s’habituer à l’industrie. Aux débuts il était dans des situations inconfortables mais une fois habitué il pouvait être très bon. Il est assez cool mais évidemment comparé à moi, il l’est moins.

  Etait-ce facile de se mettre dans la peau de quelqu’un qui est calme et fait la tête ?
  Ce n’était pas difficile du tout. Je n’ai pas eu assez de temps pour préparer ce film mais pas à pas, j’ai donné confiance à Charlene. Si j’avais eu plus de temps, j’aurais fait mieux.Le travail de réalisateur est très important, surtout sa communication avec les acteurs. Ca dépend du réalisateur, si le réalisateur écoute ses acteurs et travaille avec eux, c’est bien. Si le réalisateur est très subjectif et ne sait pas communiquer avec les acteurs, c’est plus difficile.

Le réalisateur de ce film, Joe Ma, est très subjectif bien qu’il paraît gentil. Quand j’essayais de faire une suggestion mais qu’il refusait gentiment, qu’est-ce que je pouvais faire ? Parfois le réalisateur ne sait rien, parfois les acteurs ont de bons arguments aussi. Joe Ma est un bon réalisateur alors je ne peux insister sur mes points de vue et que faire de mon mieux pour correspondre à ses souhaits.

  Si la communication avait été meilleure, vous auriez pu être meilleur ?
  Ca aurait été plus frais. Ce n’est pas juste ce film mais aussi bien d’autres. Être subjectif est une bonne chose mais quand ça prend de trop grandes proportions et qu’il y a de la pression ou de la tension sur le plateau, ça empêche les acteurs de jouer naturellement. La vie devrait être plus relax.
  Qu’est-ce que vous avez trouvé d’intéressant dans le script de Men Suddenly In Black ?
 

Le film est très stylé. Il décrit un groupe d’hommes et de femmes comme des policiers et des bandits. Ce n’est pas une comédie, on ne veut pas que le public s'attende à rire en salles. Le film devrait donner à réfléchir par après, du genre : "Si j’étais un homme, je serais comme ça? Si j’étais une femme je serais comme ça?".

Jordan Chan dans Men Suddenly in Black

 

On a bien aimé faire ce film et c’était un plaisir d’aller travailler tous les jours. En tant que groupe, on discutait et on faisait des commentaires sur chacun, Edmond Pang est un réalisateur extrêmement capable.

  C’était facile pour vous et les autres acteurs de rester sérieux en disant vouloir être un niqueur ou un branleur ?
  Les sous-titres anglais sont différents des sous-titres chinois. La scène montre Eric Tsang demandant si on préfère sortir et niquer ou bien rester à la maison tout seul et je réponds : « j’ai décidé… sortir et niquer ». Le timing de mon dialogue est très important. Rappelez-vous que c’est un film très sérieux, c’est un film d’action où les maris sont les bandits et les femmes la police. Au début c’est un film qui essaye de paraître cool mais ça fonctionne.
  The Spy Dad, c’est un film totalement différent…
  Evidemment, ce n’est pas la même chose. Je suis d’Interpol et il y’a un virus similaire au SARS mais 30 fois plus puissant. Je casse malencontreusement le contenant de ce virus, l’inhale et retombe en enfance comme un gamin de 4 ans. J’arrive dans la maison de Tony Leung Ka-Faï et beaucoup d’incidents drôles arrivent…
Sa carrière en général
  Vous avez participé à beaucoup de films : vous préférez les gros ou les petits budgets ?
  Tous les films n’ont pas de gros budgets. Vous pouvez sentir que le développement des films a changé. Les films sont principalement Stephen Chow – Jackie Chan, Stephen Chow – Jackie Chan, Stephen Chow – Jackie Chan, Stephen Chow – Jackie Chan. Tous les autres sont des moyens budgets. Ceux qui ont vraiment des tous petits budgets, ils ne sont pas à considérer comme des films. Il n’y a pas de place entre ces différentes catégories.

Le réalisateur Peter Chan m’a dit une fois, et je m’en souviens encore, que vous pouviez faire 10 films en un an, neuf seraient mauvais et un seul serait bon. Mais un seul film est déjà suffisant.

Parfois, les commentaires sur comment un film devrait être sont tous positifs mais au final le résultat peut être différent. Le succès d’un film repose vraiment sur comment le groupe peut se serrer les coudes et ce sentiment perdure jusqu’au bout. S'ils y arrivent alors le film devrait être bon.

Cette année et l’an passé, je vois qu’il y’a plus d’argent investi dans les projets. Je pense que les perspectives des films HK vont aller en grandissant.

Pour la différence avec les petits budgets, je pense qu’on a plus de choses à faire passer dans ces petits budgets tandis que pour les gros budgets on sait qu’on est suffisamment bon pour être casté, le réalisateur le sait et généralement les acteurs tendent plus à s’attacher à ce qui est prévu et y mette moins de conviction.

  Est-ce qu’il y’a un rôle que vous rêveriez de jouer ?
  Les films et la psychologie sont reliés de plusieurs façons. Je veux jouer le rôle d’un psychopathe, de quelqu’un de mentalement dérangé parce que dans la vraie vie je ne le suis pas. Je n’aime pas être un héros, je préfère laisser ça à Jackie Chan, j’aime les personnages qui sont moins évidents. Habituellement, quelqu’un ne peut pas prédire quels seront les prochains gestes d’un psychopathe, ce qu’il pense. Un marginal est tellement discret que personne n’essaye de le comprendre. Personne ne sait à quoi ressemble sa vie, ce qu’il pense, ce qui lui arrive, il y a beaucoup de choses à explorer pour moi.
  Quel film aimez-vous le plus dans votre carrière ?
  Aucun.
  Quel film vous évoque les meilleurs souvenirs ?
  La série Young & Dangerous parce qu’on était à cinq, Wind Fire Sea (ndr : précédent groupe de Jordan Chan), Ekin et Lo. Cette série évoque beaucoup de souvenirs. Avant, personne ne nous connaissait et après, on était célèbres. Quand on travaillait ensemble, on était contents. En ce temps, l’industrie cinématographique était en dépression et j’ai été surpris qu’un film HK de gangster puisse être si bien accueilli et il y avait de longues files à l’entrée des cinémas lors des séances de minuit.
  Comment vous vous préparez pour les films d’action ?
  Je veux faire plus de séquences d’action mais on ne le laisse pas les faire. Dans beaucoup de mes films, j’aime faire ça moi-même et ne pas utiliser de doublures. Peut-être que parce que j’étais danseur avant, j’ai l’envie d’accomplir ces séquences. Evidemment, je ne pourrais pas rivaliser avec Jet Li ou Jackie Chan, ce sont des artistes martiaux et ils pourront mieux le faire. Aussi les réalisateurs ne me laissent pas trop en faire et évidemment, je ne pourrais pas insister pour faire une démonstration devant la caméra. J’aime les scènes d’action, c’est excitant de lancer des coups de poings et de pieds, des choses que je sais faire mais maintenant, il y a très peu de films de ce type.
  Pensiez-vous devenir acteur, voire réalisateur ou producteur plus tard?
  Quand j’ai commencé le cinéma, j’ai pensé devenir réalisateur. Mais maintenant, les gens ne me croiraient pas si je le faisais, je n’en ai pas encore la capacité. Sans doute plus tard… Si je deviens réalisateur, le premier film que je ferais serait une comédie musicale comme Grease ou West Side Story, il n’y en a aucune à Hong-Kong. Je ne réaliserais pas de comédies ou de films d’actions.
  Qu’est-ce qui est le plus important pour vous maintenant : chanter ou jouer la comédie?
  Actuellement, j’aime chanter parce que c’est tout ce que je peux exprimer, c’est mon monde et je peux y faire ce que je veux. Dans les films, je n’ai pas de contrôle sur les autres stars, les producteurs, réalisateurs, scénaristes. J’aime faire des films et l’esprit d’équipe mais lors de l’enregistrement d’un album, je peux être moi-même et dire ce que je veux. Ce n’est pas difficile de combiner la musique avec la comédie, j’ai été dans 2-3 spectacles musicaux avant et c’était fun.

Tous nos remerciements à Ann et Mell, ainsi qu'à Jordan Chan.

date
  • octobre 2003
crédits
Interviews