ma note
-/5
Merci de vous logguer pour voir votre note, l'ajouter ou la modifier!
moyenne
3.58/5
Au Gré du courant
les avis de Cinemasie
3 critiques: 4.25/5
vos avis
10 critiques: 3.75/5
Souffle, retenue, un Naruse estimable
Au Gré du Courant est dans le genre l'une des plus grandes réussites de Naruse car il développe des thèmes si forts avec une telle justesse, retenue et un tel recul qu'il en paraît aussitôt d'une immensité quasi inégalable sauf peut-être par un autre maître comme Mizoguchi, même si les femmes de ce dernier semblent plus résignées face à l'échec sentimental ou professionnel. L'intérêt de
Au Gré du Courant est de suivre le quotidien d'une maison de geisha très souvent proche de la banqueroute, entreprise tenue non pas par la patronne, mais par sa principale bonne à tout faire interprétée par une Tanaka Kinuyo d'une belle justesse. On la voit servir le repas, être aux petits soins pour la petite souffrante, commander la soupe en vitesse pour un policier venu dire bonsoir, donner de l'argent de sa propre poche pour les petites gourmandises, et parfois tenir le rôle de vraie conseillère. Tandis que certaines des geisha souffrent à cause d'histoires de coeur en déclin (dont une Sugimura Haruko cabotine, mais toujours excellente, que l'on verra notamment dans son génial rôle de commère dans
Bonjour d'Ozu), d'autres voient leur rencard tomber à l'eau et l'argent disparaître de plus en plus.
Certaines sont même raillées de la carte de clientèle d'une épicerie quelconque, incapables de régler les dettes accumulées. Naruse questionne alors la popularité des geisha dans une société en cours de mutation, où la jeunesse ne semble plus vouloir faire comme les parents, notamment Katsuyo (Takamine Hideko) contestant le rôle de geisha au sein d'une société de plus en plus à la recherche de dactylographes que de musiciennes gracieuses. L'un des derniers plans, montrant chaque femme de leur côté, évoque alors une véritable séparation "humaine" entre les femmes de la maison de geisha, créant ainsi le doute sur la pérennité de l'établissement, un propos encore plus soutenu par ce plan montrant Takamine Hideko en pleine séance de couture, comme si il était pressant de s'adonner à un travail qui rapporte, quitte à le perfectionner le plus rapidement possible et ainsi assurer une certaine sérénité financière. Naruse démontre alors les difficultés rencontrées par ces geisha modernes, tenaces mais sentant toutes au fond d'elles que le navire est proche du naufrage, avec retenue et grâce, peut-être de manière moins larmoyante qu'un Mizoguchi, c'est aussi pour ça que cette superbe oeuvre est d'autant plus accessible.
La vie d'Oharu, femme de ménage
En s'attaquant à un des sujets de prédilection de Mizoguchi, Naruse ne retrouve qu'en partie le souffle de ses grands opus précédents,
Le Grondement de la Montagne et
Nuages Flottants. Ces geishas ont certes force bagout et caractère, mais aucune d'entre elles ne parvient à susciter le même attachement que la petite soubrette à leur service, incarnée par une formidable Kinuyo Tanaka. Le film doit ses meilleurs moments à ce personnage humble et discret – pas si éloigné de celui auquel l'actrice avait prêté ses traits dans
La Mère – si l'on excepte quelques belles scènes où Hideko Takamine crève l'écran dans son rôle de fille à maman en quête d'indépendance. Pour le reste, force est d'avouer qu'on a un peu de mal à suivre les conversations de ces mesdames sur la longueur, d'autant que la photographie ne figure pas parmi les plus inspirées de la carrière de Naruse. En demi-teinte.
Le crépuscule des maisons de geishas
Une petite et traditionnelle maison de geishas dans le Japon d'après-guerre : les commerçants ne font plus crédit; les vocations et les clients se font rares ; il n'y a plus guère que les petites filles qui s'intéressent aux kimonos, à l'apprentissage du shamisen ou du nihon-buyo....
Par les yeux d'une récente veuve qui se fait embaucher dans la maison (Kinuyo Tanaka), on découvre les coulisses de la maison (les hommes, les clients, sont absents) : la maîtresse de maison qui tente de tenir la barque (Isuzu Yamada ), la fille dévouée mais qui ne veut pas assurer la succession (Hideko Takamine), l'employée insatisfaite (Haruko Sugimura), la jeunesse qui n'a pas fait les bons choix d'orientation (Mariko Okada).
C'est donc la dream team des actrices de l'époque qui se retrouve pour cet éloge funèbre, empreint d'une tristesse très narusienne, mais qui déçoit un peu tant par rapport aux autres films narusiens sur un thème proche (Quand une femme monte l’escalier (1960) pour les bars, Une femme dans la tourmente (1964) pour le petit commerce de proximité) qu'à la référence sur le sujet, le contemporain Rue de la honte de Mizoguchi, sorti la même année.