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Grotesque

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Xavier Chanoine 0.5 Lorsque l'horreur d'un possible fait divers laisse place au grotesque
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Lorsque l'horreur d'un possible fait divers laisse place au grotesque

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Faire une chronique de Grotesque reviendrait à s’intéresser de près au film polémique de Shiraishi Koji, qui a le toupet de se fiche entièrement du spectateur pour mieux dynamiter le genre, de manière très personnelle certes, mais surtout égoïste. Mépris du torture-movie qui eut son heure de gloire avec des bandes barely legal au Japon au cours des années 80, mépris du film de genre à connotation humoristique comme ont pu l’être un Evil Dead 2 ou Braindead, parce que le cinéaste ne sait jamais sur quel pied danser et laisse un goût amer en bouche une fois l’expérience terminée. On parle bien d’expérience puisqu’il n’y a pas grand-chose qui fasse penser à un vrai film de cinéma, comme c’était déjà le cas avec les premiers épisodes de la saga Guinea Pig. Un homme et une femme bientôt en couple se font capturer dans un tunnel par un malade et se retrouvent deux minutes plus tard ligotés sur une planche amovible. Un jeu sordide basé sur le niveau d’excitation du pervers débute alors, le futur couple est au centre puisque l’homme va devoir endurer le plus de souffrance possible pour sauver la jeune femme. Sera-t-il prêt à mourir pour elle ?

Sur le principe, Grotesque –qui l’est réellement- est un film qui n’assume pas grand-chose et qui a eu le malheur de se contredire à cause d’une séquence faussement « drôle » placée de façon tout à fait gratuite en fin de métrage, prétexte à prouver son dynamitage en règle du genre et prétexte à mentir sur l’authenticité dont il faisait preuve pendant plus d’une heure. Une authenticité dans les maquillages ultra réalistes, loin des quantités de latex apparentes et de colorants rouges des meilleures séries B d’horreur des eighties, et dans la mise en scène privilégiant les contrastes, les filtres, la froideur d’une lampe allogène aveuglante. Malaise. Malaise puisque la chose la plus épouvantable qui peut arriver à un cinéaste de film de genre, c’est de tomber dans le voyeurisme ou la perversité faciles. Éjaculation(s), bave, vomi, urine, massacre. Normal lorsqu’on masturbe, transperce, tronçonne et effraie son hôte. Que Shiraishi Koji tienne cette ligne directive jusqu’au générique de fin, on terminera laminé par les sales audaces d’un cinéaste qui aura osé faire ce qu’un Hino Hideshi ou un Nacho Cerda ont déjà fait il y a quelques années : montrer l’un des pires visages de l’Homme. Montrer l’abjecte et l’inqualifiable. Mais lorsque toutes ces fondations sont démolies en fin de métrage par un clin d’œil gore renvoyant à Raimi ou Jackson, le cinéaste qui « a osé » n’assume au final rien ou pense que ce qu’il a mis en scène n’est au final qu’une grosse blague, renvoyant ce qui ressemblait à un sordide fait divers vers le cinéma de fiction, annihilant la réflexion potentielle qui tournait autour de cette séquestration, pour au final en rire et ne retenir que cet ultime plan grotesque. Ou comment utiliser le médium cinéma pour étaler les pires horreurs pendant une heure, de manière salement réaliste, pour tromper son audience et ne rien assumer en un plan, certes drôle, mais définitivement hors-sujet.

Ce qui aurait pu donner de sacrés débats après projection, à la manière de l’Aftermath de Nacho Cerda, laisse place à la consternation sous fond de musique classique, procédé déjà éculé depuis belle lurette. L'une des rares bonnes idées du film est d'avoir créé un double malaise en leur faisant croire qu'ils avaient une chance de s'en sortir. On repense alors au prétexte nul d’une rencontre amoureuse timide, pour démontrer jusqu’où peut aller l’amour d’un homme pour une femme, et jouer autour de cette « épreuve » pour le salir. La fille également. Puis confronter leur crasse provoquée par un malade mental, sosie d’un Kitano plus jeune, et étaler des séquences de torture plutôt fortes dans le simple but de faire son buzz, en mettant hors-jeu le regard du cinéaste. Pascal Laugier avait réussi à délivrer son ressentiment face à la barbarie humaine, dans son film de fiction Martyrs. Shiraishi Koji exploite les sévices –qui peuvent arriver à cent mètres de chez vous- pour en faire un divertissement et rendre l'ensemble, au final, grotesque. Étrange école.



18 octobre 2009
par Xavier Chanoine


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