Grand coup de batte dans la gueule !
Un pré-générique, pourquoi faire ?
(Ou comment résumer le résumé)
Contrairement à d’autres fameux croquemitaines du répertoire fantastique, le "Shounen Bat" fait son apparition quand on s’y attend le plus !
Générique de début : « AAAAAAAAYYYAAAAAAAAAAOOAH »
(Ou comment aborder une vie ultra speed avec un rythme effréné)
Selon les épisodes, cette série revêt plusieurs aspect. Thriller, action, comédie, fantastique, burlesque, horreur, drame, étude de mœurs, constat social, parodie, auto-parodie, film d’auteur (ouf !), un maelstrom de genres passés à la moulinette en seulement 13 épisodes. Véritable tour de force, la série arrive à rester fluide grâce à des auteurs ne perdant jamais de vue leur trame principal: un scénario en béton armé.
KON Satoshi n’a pas fait la même erreur que
ANNO Hideaki sur
Neon Genesis Evangelion: il ne s’éloigne pas, sur la forme du pur divertissement. L’approche est différente, les nombreuses réflexions sur le Japon éparpillées sur tous les épisodes sauf à la fin où tout redevient - plus ou moins - normal. On retrouve les mêmes réflexions que dans
Serial Experiments Lain,
Evangelion (donc) ou même chez
OSHII Mamoru : la solitude et autre folie nées de l’urbanisation et de ses excroissances, ainsi que le désormais classique mélange réalité / virtuel. Kon fait fort quand il se montre, lui et son équipe de dessinateurs, lors d’un épisode fabuleux - ils le sont tous - en train de galérer pour finir son DA dans les temps. L’objectif est manifestement de désacraliser le manga et de ridiculiser la fan-attitude en empêchant l’otaku de tout vivre par procuration. En particulier devant son poste de télévision pour attirer les moineaux les pigeons... Et Satoshi Kon de se rendre compte (…)
Eyecatch : Accroche au milieu de l'épisode : « SCRITCHOUTHCRATCH »
(Ou comment échapper au milieu du milieu grâce à ce merveilleux support qu’est le DVD)
(…) qu’il fait partie d’un rouage infernal visant à pousser le spectateur à la fan-attitude, donc à la consommation. Et ça, ça le gave apparemment grave sa mère la père Satochi. Réel prolongement de
Perfect Blue,
Paranoïa agent enfonce le clou en ajoutant aux répercutions psychologiques l’aspect cynique et cyclique (aka the « Cy-cy », aussi appelé « Impératrice ») d’entreprises et d’individus sachant pertinemment ce qu’ils font mais ayant choisi de se voiler la face pour continuer à avancer. Malheureusement pour eux, le Shounen Bat veille aux grains et comme ils en ont tous au moins un, il va y avoir du boulot.
En un seul épisode, Kon ridiculise les vagues de suicide au Japon avec un humour noir bienvenu et optimiste. Un autre se moque ouvertement des jeux de rôles, truc de jeunes, pour mieux dans l'épisode suivant ridiculiser les nostalgies régressives d’un vieux policier dépassé par les évènements. Les thèmes se croisent, s’opposent, les personnages également, le rendu est contradictoire et déstabilisant. cela nous rappelle les techniques narratives d'un
John Sayles par exemple, en particulier son chef d'oeuvre
City of Hope auquel la série emprunte beaucoup de ses chemins tortueux, des chemins mélangeant plusieurs personnages pour opposer frontalement leurs destins et ainsi désamorcer toute forme de manichéisme.
Paranoia Agent conduit son public vers une réflexion peut être non souhaitée mais obtenue, une compréhension de
« what the f... is going on! » étant logiquement désirée. On touche là l’art du divertissement, procurer un plaisir instantané tout en n’omettant pas de mettre des bouts de réflexion - et d’opinion - dedans.
Beaucoup de questions sont posées pour n'obtenir que peu de réponses à l’arrivée, si ce n’est dévoiler la multiplicité des points de vue, tous justifiés, et d’en obtenir une ouverture d’esprit nécessaire à l'acceptation du doute. La déstabilisation n'ayant après tout qu'un temps. Mais c’est moins drôle que les pigeons.
GENERIQUE-BERCEUSE DE FIN : « Ti, ta, ti, tililouuuu… »
(Ou comment ne pas rester dupe d’une complexité roublarde grâce à un repos bien mérité).
Oui... mais non, non et non!!!!
Evidemment, KON Satoshi est intelligent et talentueux, mais reste à savoir de quel talent l'on parle. Pour moi il reste le roi des adjuvants, vous savez ces produits qui vous font croire que quelque chose à du goût mais qui n'aboutissent à un formatage de ce qui nous est proposé. Si sa capacité à "gonfler" une histoire simple pouvait encore coller au thème de Millennium Actress, et que le "soufflé" Perfect Blue était des plus prometteur jusqu'au dernier quart du film, le syndrome devient encore plus évident avec Paranoia Agent. La construction des 6 premiers épisodes laissait pourtant présager de bien bonnes choses, il y avait là de quoi mettre en appétit même le repus des animevore. Malheureusement, dès que l'on quitte les deux policiers, les choses se gâtent, on pourrait dire que la construction part dans des histoires parallèles pour mieux revenir sur son sujet dans le final. Mais désolé, c'est un peu trop gros pour moi. C'est simplement de la dissimulation, heureusement que le talent de Kon Satoshi est là pour faire passer la pilule, mais le peu de considération qui est faite du spectateur me rend insupportable toute la deuxième moitié de la série malgré tout ce qu'elle peut comporter de positif comme les notes d'humour noir parfois savoureuses.
Alors malgré les réelles qualités de la série, sur le plan de l'animation notamment, Paranoia Agent n'est pour moi qu'une énorme bulle qui éclate bien avant le dernier épisode, une série qui me donne l'impression d'avoir perdu mon temps pour rien. Je crois que quoi qu'on en dise je ferai définitivement une croix sur les oeuvres de Kon Satoshi à présent... Bref mon conseil du jour, oublier Paranoia Agent et tournez-vous vers Texhnolyze par exemple qui en un épisode contient plus que la série Paranoia Agent complète!
Une réussite de plus pour Kon Satoshi.
(Aucun spoiler excessivement révélateur dans ce qui suit.)
En moins d'une décennie et avec trois longs-métrages d'animation à son actif (1), Kon Satoshi se sera fait un place de choix parmi les ténors de l'animation japonaise. Exploitant dans ses films des sujets variés tels que le dédoublement de la personnalité, l'univers des idoles de la chanson pop et du cinéma, la quête d'un amour perdu, la pauvreté urbaine ou encore les difficultés de communication entre les générations, Kon Satoshi a toujours su apporter un regard critique sur la société japonaise, ne prenant néanmoins pas le pas sur l'histoire ainsi que les personnages, et évitant de sombrer dans la lourdeur démonstrative. Du reste, ses oeuvres témoignent d'une culture cinématographique indéniable, les références allant de Hitchcock à Welles, en passant par quelques figures emblématiques du cinéma nippon tels Kurosawa ou Mizoguchi - références surtout visibles dans ses deux premiers films. Dès lors, l'annonce d'une série animée réalisée par Kon Satoshi, comptant 13 épisodes de 20 minutes (ce qui représente en tout presque 5 heures), et étant orientée thriller, ne peut être que réjouissante.
Et concrètement, ça vaut quoi ?
Le générique donne le ton : sur fond d'une musique entraînante, les principaux personnages que nous serons amenés à voir au cours de la série défilent à l'écran, riant tous comme s'ils semblaient nous narguer ; comme pour nous faire comprendre qu'on va nous faire tourner en bourrique jusqu'à la fin (voire même après la fin). Paranoia, dites-vous ?
Et puis ça commence, et on se familiarise avec des dessins et un chara-design qui sont dans la continuité des deux derniers films en date de Kon Satoshi ("Perfect Blue" étant un peu en retrait à ce niveau), certains personnages étant même plus ou moins des clins d'oeil à ces films. Ainsi, il ne sera pas rare de se demander si on a pas "déjà vu cette tête quelque part".
Mais venons-en à l'histoire elle-même. Les premières images de cet épisode permettent d'ores et déjà de constater que Kon Satoshi va à nouveau traiter des problèmes de société, en montrant d'entrée de jeu un microcosme nippon adepte du téléphone portable. En effet, c'est sous un soleil de plomb que nous découvrons cette population tokyoïte transpirante, les gens ne développant d'autres liens qu'avec leurs ustensiles de communication. Le portable pourrait justement symboliser la communication dans un modèle social individualiste, mais nous voyons rapidement qu'ici ce n'est pas le cas, les conversations et les messages émis étant marqués par un dédain significatif.
Et à ce climat très pessimiste viennent s'ajouter des signes avant-coureurs des événements futurs mais qu'on ne peut déjà interpréter à ce stade-là. Premièrement, un vieillard griffonant à la craie blanche des dizaines de lignes de calculs scientifiques à-même le sol. Deuxièmement, une inscription sur un mur. Entre temps, on aura pu aperçevoir le joli minois d'une fille qui semble triste, portant sur elle une peluche totalement "kawaii". Et c'est cette fille qui va être au centre de cet épisode.
Sagi Tsukiko, jeune designer de peluches, doit son succès à la création de Maromi. Hélas, tout ne va pas pour le mieux dans sa vie professionnelle, puisqu'elle doit élaborer une nouvelle peluche, censée remplacer Maromi (symbole de la perpétuelle évolution d'un effet de mode à un autre, les nouveaux modèles supplantant rapidement les anciens), mais qu'elle souffre d'un manque d'inspiration. En plus de ça, ses collègues de bureau complotent derrière son dos.
Le soir même, lorsque Tsukiko rentre chez elle, celle-ci se fait agresser en recevant un violent coup sur la tête par une personne qu'on ne verra que furtivement.
C'est à ce moment qu'on rentre dans l'engrenage classique du thriller. Les journalistes s'en mêlent, les policiers enquêtent, rapidement tout le monde est au courant de l'affaire et on commence à émettre des hypothèses. Un portrait robot dessiné par Tsukiko renseigne sur l'apparence physique de l'agresseur, s'apparentant à celui d'un enfant muni d'une batte de base-ball. A nouveau, ce qui pourrait sembler anodin voire superficiel cache en fait un constat peu gratifiant de la jeunesse japonaise, ici mise au rang de suspect dans un mal pouvant secouer une ville d'une telle importance. Et avant la fin de l'épisode, une autre personne sera victime du "Shounen Bat" (le garçon à la batte).
Ainsi, les 4 premiers épisodes de la série vont nous permettre de nous familiariser à chaque fois avec un ou plusieurs nouveaux personnages, jusqu'à ce que ceux-ci ne se fassent agresser à leur tour par le "Shounen Bat". Ces épisodes permettent aussi de mettre en évidence l'orientation très psychologique de la série, qui va renouer avec le premier film de Kon Satoshi (nb: "Perfect Blue"), notamment dans l'épisode 3 qui mettra en scène un personnage schizophrène. On se rend compte également que le découpage des scènes accentue judicieusement les effets liés aux cauchemars ou l'indétermination face à ce qui est réel ou imaginaire.
L'épisode 5 va, quant à lui, plutôt faire penser à "Millenium Actress", en faisant intervenir dans des scènes fantaisistes, des personnages "spectateurs", qu'on verra donc exécuter visuellement des actions qu'ils ne seront qu'en train d'imaginer collectivement.
A partir de l'épisode 6, et ce jusqu'à l'épisode 10, Kon Satoshi va abandonner la linéarité schématique des premiers épisodes, pour densifier le sujet principal de "Paranoia Agent" en donnant une vision plus large d'aspects sociaux ou culturels liés au contexte de la série. Ainsi, certains épisodes paraitront presque décalés, à l'image de l'épisode 8 qu'on pourra considérer par moments comme l'équivalent animé et raccourci du film "Suicide Club" de Sono Shion, ou encore de l'épisode 9 qui reprend le principe des légendes urbaines, appliquées au "Shounen Bat", sans oublier l'épisode 10, qui présentera les métiers liés à la conception d'un film d'animation. Le tout traité avec beaucoup d'humour pour éviter un discours trop moralisateur.
Pour finir, les 3 derniers épisodes vont amener à un épilogue digne de ce nom, c'est-à-dire apportant les réponses à nos questions, et cela tout en apportant une ouverture et matière à réfléchir.
A noter que ces derniers épisodes vont offrir à "Paranoia Agent" une complexité scénaristique encore plus étendue, rapprochant même la série de "Lain" par moments.
Techniquement, la qualité est aussi au rendez-vous. Et si le chara-design de Ando Masashi ou les compositions de Hirasawa Susumu sont très corrects, c'est surtout la "patte" du réalisateur Kon Satoshi qui tend à rendre l'ensemble plus ou moins virtuose. Ajoutons à cela une post-synchro faite partiellement à partir des voix et non pas des dessins, et on aura idée du soin apporté à cette série.
Très recommandé, donc.
***
(1) Kon Satoshi a réalisé "Perfect Blue" (1997), "Millenium Actress" (2001) et "Tokyo Godfathers" (2003). Il a également signé quelques scénarios - outre ceux de ses films -, tel celui du segment "Magnetic Rose" du tryptique "Memories" (1995), co-réalisé par Morimoto Koji, Okamura Tensai et Otomo Katsuhiro.
Plongez dans la folie humaine
Une très bonne série qui sort des sentiers battu mais qui reste dans le style du réalisateur.
Elle débute comme un thriller mais s'oriente ensuite vers une étude sociologique et psychologique du Japon.
Sinon, pour de plus amples informations, je vous renvoie a l'exellente critique d'
Antaeus qui décrit la série parfaitement.
LA ROLLS ROYCE DE LA SERIE ANIMEE ?
PARANOÏA AGENT, qui brasse autant de thèmes différents que la prostitution, la paranoïa, le suicide, la détresse humaine, la folie, etc etc etc, est pour moi la Rolls Royce de la série animée - même si j'en ai vu assez peu à ce jour. Ainsi donc, je vous conseille ce chef-d'oeuvre télévisionnaire de Maitre
Satoshi Kon dans son magnifique Coffret Édition Prestige 5 DVD !
Critique partielle
Le festival Fantasia de Montréal (qui pour moitié de sa vocation remédie quelque peu chaque été à l'affiligente pauvreté de la distribution des films asiatiques en Amérique du Nord) vient de produire rien de moins qu'une énorme frustration en diffusant 80 minutes de la dernière oeuvre de Kon Satoshi, soit les 3 premiers volets de cette série t.v. qui en compte 13. Treize, un chiffre un peu trop usé, un chiffre cliché mais qui laissait quand même présager, en plus du titre, quelque chose d'un peu plus inquiétant que les derniers opus de Kon.
Ce 3 sur 13 est en effet très alléchant. Kon abandonne une partie de l'humanisme de "Millenium Actress" et du très réjouissant "Tokyo Godfather" pour retrouver le thème de "Perfect Blue" qui en avait surpris beaucoup en construisant son intrigue autour de l'apparente - on en dira pas plus - psychose paranoïaque d'une jeune chanteuse pop et sucrée.
Le moteur de la série à l'air simple : un jeune (ou petit) individu évoluant en roller-blade attaque des individus à la batte de base-ball. Première cible : Sagi Tsukiko, qui designe des peluches célèbres. L'énigme va se nouer entre paranoïa urbaine et ... psychose individuelle car aucune des victimes n'en semble dépourvue. Et il se pourrait que chaque nouveau volet ait sa ou ses victimes. L'on devine d'emblée que quelque chose de ténue relie ces dernières. Mais quoi? Et qui est donc ce petit grand-père perdu entre sénilité et lucidité qui semble anticiper, dans ses fresques de trottoirs, l'identité des victimes? Qu'est devenue la vieille dame sans domicile? Dans combien de temps le reste des Dvd sera en vente en Amérique du Nord? Frustrations, frustrations...
La série de Kon est donc bien campée... entre malaise et bien être. En trois épisodes, Kon installe une ambiance pas trop lourde mais dont on devine comme un revers un peu plus inquiétant. On pense encore une fois à "Perfect Blue". La série bénéficie à ce titre de génériques tout à fait remarquables et qui participent, comme c'est de plus en plus souvent le cas, à l'ambiance voire ici, à l'énigme de la série. En l'espèce, pour la participation du générique à l'ambiance, on pense à Haibane Renmei.
Le premier générique, sur fond de musique assez entraînant, joue sur le décalage entre les personnages présentés par ordre d'apparition comme il se doit et tout à fait hilares - sauf Sagi, toujours perdue - et les fonds sur lesquelles ils apparaissent, tantôt sordides (une décharge), tantôt improbables (en chute libre sans parachute), voire franchement inquiétants (explosion nucléaire, thème qui revient deux fois dans le générique de début). Puis l'on repasse encore une fois en revue l'ensemble des personnages toujours hilares - sauf Sagi toujours perdue - au beau milieu de la circulation automobile. Il s'en suit un portrait de "famille" : ils sont liés on vous dit, l'énigme est ailleurs mais l'ambiance est là, du moins pour le côté électrique. Le côté contemplatif qui compose ce climat ambigü, est renforcé, lui, par le générique de fin qui prend le contre-pied de son prédécesseur. On assiste au même défilé des mêmes personnages, dans le même ordre, tout à fait... endormis, si ce n'est un curieux "flash" de quelques secondes. Au terme de ce défilé, le plan s'élargit et l'on voit que cette très assoupie assemblée forme, outre le fil de l'histoire et encore une fois une chaîne, un point d'interrogation au milieu duquel siège quelque chose qui vous fera sourire. S'en suit l'éternelle et regrettable (et frustrante) présentation de l'épisode suivant, pas toujours très claire par contre, et c'est un effet mesuré, qui met en scène le petit monsieur sénile.
On espère vraiment que l'intrigue ne repose pas seulement sur le fait que toutes les victimes sont liées parce qu'en l'espèce, le clou est enfoncé, même si la manière y est. À ce sujet, le montage suit le rythme répétitif du genre et c'est presque trop orthodoxe pour que l'on y croit vraiment : chaque épisode à sa ou ses victimes et distille son lot d'indice. Un classicisme rigoureux qui pourrait-être se révéler instrumental. Du coup, on attend le renversement.
L'animation n'est généralement pas ce que je retiens des films de Kon, et il aurait fallu une deuxième projection pour pouvoir en dire un peu plus. Donc, en première analyse, on se contentera de dire que l'animation est convenue (ce n'est pas "Lain") et léchée. On a parfois l'impression que Kon emprunte certaines couleurs à Miyazaki, certains angles à Otomo Katsushiro, mais cela relève d'un fantasme personnel.
Mais outre le fait que Kon reprend là le thème qu'il avait si habilement exploité dans "Perfect Blue", ce qui rend facilement identifiables les films de Kon, ce qui fait la cohérence de sa filmographie, c'est ce regard presque sociologique ou plutôt documentaire, attentif qui parcourt toute son oeuvre. Si "Perfect Blue" était campé dans le monde du succès rapide des petites chanteuses à la mode japonaise, "Millenium Actress" revisitait l'histoire du Japon à travers l'histoire de son cinéma (sacrée mise en abîme), et "Tokyo Godfather" faisait le portrait humaniste des sans-abris et des marginalisés, Kon se livre ici à une petite série de portraits qui attestent d'un sens de l'observation et d'un intérêt pour la société japonaise à mille lieux de la nostalgie de Miyasaki. Le deuxième épisode, notamment, nous ouvre les portes de l'école élémentaire japonaise avec son lot de traditions dont l'élection du président des élèves, mais, et c'est un détour qui valait l'effort, du point de vue de celui qui à toutes les chances de la remporter.
Il est bien sûr tout à fait impensable de se risquer à envisager la suite, sauf que si l'on devait parier, je miserai sur une histoire de libération.
Fondamentalement intéressant, oui, mais trop intello.
Je viens tout juste de finir de visionner le dernier épisode de la série, après avoir fait l'expérience de "Paprika", oeuvre qui est sans doute à mettre en lien avec "Paranoia".
Il est indéniable que la qualité (formelle et intellectuelle) est au rendez-vous, mais n'est-on pas en face d'objets aussi intéressants qu'indiscernables, voire frustrants ?
Les fins des deux oeuvres semblent dire : La boucle est bouclée, mais vous ne saurez jamais comment, ni vraiment pourquoi. D'où le sentiment de sortir de la salle (ou de l'écran, littéralement pour "Paranoia") en ayant trop et peu d'éléments à la fois.
Le "rêve prémonitoire" est significatif d'une envie de recul et d'analyse ne prenant toutefois pas le risque de trop s'engager, au risque de devenir ambigu, voire contradictoire avec les flux d'images précédants ce supposé retour en arrière (générique d'introduction, forme du résumé). D'où l'inadaptation d'une ouverture et d'une cloture (le syndrome du post-générique est une nouvelle fois révélateur) qui enferment un discours qui se veut universel et totalement ouvert à discussions.
J'aurais alors souhaité un film comme "Paprika", malheureusement ce dernier souffre du syndrome de la redite et au final, Sotoshi Kon décoit par ce cadre dépassé par lui-même et pour lui-même (le rêve dans le rêve, les multiples interactions entre flux d'images) qui, s'il est intéressant dans sa réflexion, n'apporte qu'une position intellectuelle qui démontre, analyse et...... j'attends toujours la fin, j'attends qu'Il conclue ses calculs à la craie.
N'aurions-nous pas là le meilleur animé ?
Paranoia agent pousse le niveau de qualité à un tel point qu'il est difficile de trouver un animé du même niveau. Faisons simple : quasiment tout est parfait, forme et fond. Les premiers épisodes d'exposition sont exceptionnels (mention spéciale pour l'épisode sur Harumi) et installent progressivement le thème central. L'extension de l'histoire d'un petit groupe de protagonistes bien définis au départ vers une population plus large nous offre des épisodes au ton à chaque fois varié et à la qualité toujours constante. On reconnait les thèmes et le style chers à Satoshi Kon et c'est tant mieux car jamais ils n'ont été à ce point aussi bien mis en image. Intelligent, captivant et parfois en tout point.