Arno Ching-wan | 3.75 | Truands de bas étage |
Ordell Robbie | 3.75 | Bon(g) mais pas très fin(-ho). |
Après la débâcle « Okja mais plus ça », ce Parasite apparaît comme joliment sauvé par le Bong, palmé qui plus est, ce que ne sont pas les doigts de l'artiste.
Concernant les défauts, car il y en a, j'ai cru entendre un score piochant dans d'autres (le Koyaanisqatsi de Glass et la Déchirure d'Oldfield, mais peut-être me gourré-je). Il est sinon amusant de constater que l'auteur s'emmêle un peu comme Jarmush avec son Dead Don't Die – également présenté à la croisette - sur le fond de son histoire, se justifiant in fine avec force monologues sur son propos plutôt que de laisser les images parler d'elles-mêmes. Ca tire un peu sur la fin, trop pesante pour emporter le morceaux à 100% (récurrence locale). Pour autant, le réalisateur de Mother s'en amuse au préalable. Il prend de la distance avec cynisme par rapport à toutes ces métaphores adorées du critique à l'aide de deux gamins qui, justement, usent de métaphores pour arnaquer leur monde (cf. la pierre, les dessins). Bong Joon-ho arnaque à l'international en métaphorisant – c'est euphorisant - de ci de là son histoire et il ne s'en cache pas. Ca marche, hop : Palme d'or.
L'évolution notable dans sa filmo, c'est le remplacement d'un monstre fantastique, d'un tueur ou d'un train du futur par la réalité du monde. Ainsi, on voit cette fois une famille à la peine affronter le quotidien en survivant avec les moyens du bord, et c'est tout autant épique que dans The Host, Memories of Murder ou bien Snowpiercer. Vient très vite une aussi jubilatoire que littérale lutte des classes, chargée, grotesque comme les Coréens savent le faire – quand ils arrivent à conserver un certain équilibre et c'est le cas ici – avec quelques moment de ciné dont le réalisateur a le secret, des passages aériens qui fluidifient ce qui autrement ne serait qu'un film à tiroirs de plus. Il renforce le tout avec des idées narratives franchement brillantes, j'en veux cet agencement de deux brefs passages hilarants où l'on voit nos « héros » répéter leur texte avant la mise en place de leurs arnaques.
Réussite, donc, oui, si ce n'est que pour ma part j'en ai un peu ras la casquette des intrigues bourgeoises coréennes tordues dans de jolies maisons toutes propres, balayées par une caméra aussi inspirée que pour tourner une pub Ikea. Là, c'est bien simple, on sort du film en se disant : « comme elle est jolie cette maison » tout comme dans un tas de films provenant du matin calme – attention, tu laisses des miettes de croissant sur la table. C'est bien foutu, ras, mais on s'approche là d'un poncif qui s'en ira bientôt jouxter leurs scènes de pluie, aux Coréens. S'en moque-t-il aussi, notre heureux palmé ? Est-ce là un coup de coude à Mademoiselle et à ses consœurs Handmaidenzed ? Peut-être. A l'inverse, c'est avec la pluie et l'eau, justement, que Bong Joon-ho m'a cueilli. Ses scènes dans et autour l'entre-sol de nos truands - de bas étage donc, ah ah - sont toutes magnifiques, inspirées, vivantes, poilantes, bouleversantes. Une simple scène de pisse soulage autant qu'un abcès enfin crevé.