Un chambara noir mais rapidement oubliable
Le cinéaste Kudo Eiichi ne montre pas, au travers de cet opéra barbare et nihiliste, la grandeur de ses samouraïs, ni même leurs actes héroïques. On y voit des hommes en plein doute, se questionnant, se cherchant dans la vengeance. Faut-il même répondre par la violence lorsqu'un haut dignitaire du Shogunat abuse de ses nobles pouvoirs? Si dans l'ensemble Les 11 guerriers du devoir n'a pas la grandeur des oeuvres de Kobayashi ou de Kurosawa d'un point de vue lyrique et formel, son grand pessimisme et sa noirceur brute emportent la donne et s'autorisent la comparaison avec les oeuvres les plus sombres des auteurs sus cités sans en atteindre forcément le degré d'excellence. Il est difficile à présent de savoir si Kudo dispose de suffisamment d'ingrédients pour tenir la distance face aux chambaras plus modestes, moins politiques et davantage impliqués dans les codes d'honneur (hara-kiri, obéissance aveugle au Shogun) car si il revendique une assise visuelle rassurante (belle utilisation du scope et des décors naturels) et un suspense de qualité (les hésitations du groupe avant de tendre le piège au fieffé), ses longueurs inutiles plombent le film de son esprit épique, de même que les quelques passages romantiques sensés donner une plus grande ouverture du chambara sur un autre genre semblent ici anecdotiques ou alors de trop.
Ce manque de régularité empêche Les 11 guerriers du devoir d'être un grand chambara, et ce malgré la présence de quelques seconds couteaux du cinéma d'époque comme Natsuyagi Isao que l'on découvrait l'année précédente chez Gosha, dans le très correct diptyque Kiba, ou encore Nishimura Ko au physique particulier et à l'importance pas aussi négligente qu'on ne pense. Le final, brutal et particulièrement meurtrier prouve néanmoins les talents de metteur en scène de Kudo, capable d'instaurer un climat de chaos en jouant avec un subtil montage, des combats gores mais brefs et ce climax nihiliste digne des westerns pessimistes de Corbucci.
La flèche et les flambeaux
Dernier film de la trilogie officieuse des "jidai geki contestataires" mis en scène par Kudo.
L'année 1967 sonnait définitivement la fin de l'ère des jidai geki, mais ce n'est malheureusement pas Kudo, qui a pu l'empêcher, ni par contribuer d'une œuvre hommage au genre avec ce "11 guerriers…" toujours réalisé avec autant de brio et – surtout – panache, mais sans rien apporter de nouveau.
Le pouvoir contesté sera donc davantage mis en avant que dans les précédents, mais la formule ne change pas avec une laborieuse exposition des différents protagonistes, qui se battront à la vie et (surtout) à la mort lors d'une épique séquence finale que n'aurait pas renié le grand Hollywood de la même époque.
Les combats font toujours autant rage avec quelques pièges bien sentis pour s'attaquer aux troupes féodales mieux armées et mieux organisées, mais le souffle épique des deux précédents volets de Kudo est quelque peu retombé dans un travail plus routinier.
Un jidai geki honorable, surtout intéressant pour les fans de Kudo, mais sans grand génie – un comble quand on sait le travail autrement plus enlevé et inspiré par ailleurs du réalisateur.
TRES BEAU FILM. TRES EMOUVANT ET TRES NIHILISTE.
LES 11 GUERRIERS DU DEVOIRS EST A RANGER DANS LES FILMS ENGAGES ET DESANCHANTES. EN CE SENS ON PEUT LE RANGER DANS LES MEILLEURES OEUVRES DE KOBAYASHI (hara kiri , rebellion) OU BIEN KIHACHI OKAMOTO (samourai , le sabre du mal) SANS POUR AUTANT EGAYER CES PREDECESSEURS FORMELLEMENT ET TECHNIQUEMENT. POUR AUTANT KUDO A DE TRES BON POINTS POUR LUI: DES CADRES ET MOUVEMENTS DE CAMERAS BIEN SENTIS, UN SCOPE ET UN NOIR ET BLANC SOMPTUEUX ET ENFIN UNE TRES BELLE MUSIQUE LYRIQUE. MAIS LE PRINCIPAL ATOUT DE CE FILM EST L'IMMENSE SOUS ESTIME ET OUBLIE ISAO NATSUYAGI QUI AVAIENT DEJA BRILLE DANS LES KIBA DE HIDEO GOSHA ET QUI N'AURA JAMAIS LA CARRIERE QU'IL AURAIT DU AVOIR. IL CAMPE AVEC JUSTESSE ET RETENUE UN PERSONNAGE TRES HUMAIN ET ALTRUISTE. DU BEAU ET DU GRAND TRAVAIL MONSIEUR.