Ordell Robbie | 2 | Artistiquement loin des meilleurs B movies Nikkatsu de l'époque. |
Xavier Chanoine | 2 | Distrayant mais trop léger pour convaincre |
Avec 3 Seconds Before Explosion, bienvenue dans le monde du divertissement médiocre. Sans doute particulièrement divertissant à une époque où le grand studio Nikkatsu avait le quasi monopole sur le genre et produisait des polars pour les jeunots, le film de Ida Motomu n’a gardé de cette époque que son côté le plus ringard et dépassé à l’heure d’aujourd’hui. N’est pas Suzuki Seijun qui veut et cela se ressent dans son absence d’énergie. Le film a beau être relativement rythmé, un minimum lorsque l’on signe son polar de commande pour le studio avec en toile de fond une course contre la montre, il n’apporte pourtant rien au genre malgré des moments assez savoureux pour quiconque se sentant encore touché par cette bonne époque : nickel dans son costard trois pièces, Kobayashi Akira incarne avec classe et frime l’ex-espion parfaitement formé qu’il est, les night-clubs sont toujours autant colorés et ses chanteuses toujours aussi glamours, récitant leurs chansons avec sensualité , les vilains manient leurs pétards comme des manches mais en envoient dans leurs costumes trois-pièces également. Tout est une question de style, et lorsque 3 Seconds Before Explosion ne joue pas de son propre style, de sa propre frime, il n’est qu’un polar de seconde zone fauché, amusant le temps de trois séquences improbables où le mannequin en mousse qui s’écrase sur le sol remplace le cascadeur apeuré par le vide et où les échanges de coups de feux s’apparentent à des tirs de fusée de détresse. Le film s’autorise même un virage gore en sous-sol avec sa bouillie rose visqueuse éparpillée sur une poutre. On n’y croit pas une seconde, mais on se marre. Même sentiment lorsque les vilains mettent à exécution leurs plans d’intimidation (formidable séquence du sérum de vérité) ou se prennent des mandales.
Divertissant, oui, mais rien qui n’enlève à l’esprit le film médiocre qu’il est, fait assez grave lorsque l’on connait les artistes, oui, artistes, qui ont fait avant lui les beaux jours du studio à coups d’œuvres fortes et provocatrices, même dans le registre du simple film policier. Ca ne nous fera pas oublier non plus que le studio Nikkatsu n’appréciait pas les déviances et la folie d’un Suzuki à son sommet artistique, préférant sûrement rester cantonné au divertissement populaire accessible à la jeunesse attardée. 3 Seconds Before Explosion est le film-type pour cette génération prête à se palucher devant le moindre échange viril entre deux stars et le moindre revirement de situation pour l’amour d’une femme injustement partie rejoindre ses ancêtres. Alors bien sûr, pas de grand climax vu le manque de moyen, on reste dans du sous-James Bond avec plus de prises de risque formelles ceci dit. Pas non plus d’intrigue à tiroirs, le film de Ida ne réfléchit pas trop mais tourne autour du pot de temps à autres pour dépasser les 60mn, introduit l’organisation d’espionnage de manière désagréable avec un pré-générique bruyant et déjà bis, impressionne son audience lorsque des pêcheurs capturent un cadavre au bout de leur canne-à-pêche, sample les chœurs Leoniens pour marquer son époque et manque surtout de suspense. Rien de plus paradoxal vu le titre. Ca cherche des cailloux en guise de pierre précieuse, voilà l’objectif de l’ex-espion Yabuki, de l’agent Yamawaki et du groupe de vilains. Bilan un peu maigre, mais que pouvait-on attendre de plus d’un réalisateur qui visiblement n’a pas marqué les esprits au sein du studio ?