ma note
-/5
Merci de vous logguer pour voir votre note, l'ajouter ou la modifier!
moyenne
3.46/5
L' Amour de l'actrice Sumako
les avis de Cinemasie
2 critiques: 3.62/5
vos avis
11 critiques: 3.7/5
Superbe mélodrame sur l'univers du théâtre
Adapté du roman d'Osada Hideo, qui lui-même adaptait déjà l'histoire "fantastique' de Matsui Sumako, cette version signée Mizoguchi est l'un de ses plus beaux films de la période des années 40 avec Les Femmes de la nuit en tête. C'est toute l'authenticité du récit qui hisse l'oeuvre dans le haut du panier des mélodrames nippons surtout en cette période d'après-guerre. Il est intéressant de voir à quel point Mizoguchi donne cette fois-ci la parité aux deux sexes, car même si l'ensemble de la compagnie, de la critique et des spectateurs vouent un véritable culte en la personne de Sumako, son recruteur et metteur en scène (Hogetsu Shimamura) en est le véritable déclencheur, sans qui elle ne serait rien, juste une simple personne fatiguée de ses problèmes conjugaux. L'occasion alors pour Mizoguchi d'intensifier leur relation extraprofessionnelle en créant le mélodrame : lorsque Hogetsu lui avoue son grand attachement, cette dernière refuse d'aller plus loin. La relation ne restera alors que purement professionnelle, et cette absence de retour sentimental rendra Hogetsu malade malgré le talent inestimable de sa protégée, capable de jouer à la fois les femmes fortes et les Carmen.
C'est cette polyvalence et ce goût de casser les codes du théâtre classique Kabuki qui la rendront si populaire auprès du public japonais. [SPOILER]D'ailleurs, L'amour de l'actrice Sumako trouve ses plus beaux moments de cinéma lorsque les deux êtres se séparent par la mort. Les prémisses de la maladie d'Hogetsu sont formidables de justesse et d'effroi, ce dernier ressentant les premiers symptômes lorsqu'il dirige ses acteurs. Mais sa passion à la fois pour son actrice et pour son art le poussent à continuer malgré son fardeau, et de son côté, Sumako mettra fin à ses jours pour des raisons qui lui sont propres, même son entourage ne le comprend pas, le succès de Carmen la mettant alors sous l'un de ses plus beaux jours. Des raisons mystérieuses dont le parallèle avec la pièce de théâtre originelle n'y sont peut-être pas pour rien, et peut-être qu'au fond d'elle, son amour pour Hogetsu était bel et bien réel.[Fin SPOILER] Réalisé un an avant Les Femmes de la nuit, l'oeuvre de Mizoguchi venait de franchir un pas supplémentaire vers les sommets, qui même sans les atteindre, produisait un effort suffisant pour toucher son spectateur à la fois par sa plastique élégante et son absence d'happy end.
Théâtre de la vie
On pourrait voir dans l'Amour de l'actrice Sumako une forme de coda à Contes des Chrysanthèmes tardifs reprenant les mêmes schémas narratifs de la description de l'univers théâtral via l'ascension d'un(e) interprète et le récit d'une histoire d'amour rendue impossible par les conventions sociales. Mais ce prolongement se fait ici à une époque plus contemporaine, donnant à ces questions une toute autre résonnance thématique. La confrontation tradition/modernité recouvre ici un conflit entre théatre classique et théatre moderne, couple émancipé et tradition, tradition japonaise et influence occidentale (les pièces de théâtre jouées). A l'image de la vraie actrice Sumako qui marqua l'histoire du Japon aussi bien comme femme de théâtre que comme figure d'émancipation de la femme. Le tout est emballé par Mizoguchi avec sa maestria formelle usuelle meme si cette dernière est ici moins visible. La limite du film se situe dans son script trop court, pas assez développé. Qui plus est, les liens entre pièces interprétées et vie hors théâtre sont trop lourds, trop surlignés, le cinéma ayant fait bien mieux dans cette direction depuis. Mizoguchi aussi dans le méconnu Une femme dont on parle. Il manque également au film d'être aussi souvent touché par la grace que l'était Contes des Chrysanthèmes tardifs. Grâce qui sera plus que présente un an plus tard dans Les Femmes de la nuit.
Sortie de chrysalide
Après un premier essai d'après-guerre peu convainquant (Cinq femmes autour d'Utamaro), Mizoguchi revient à un portrait d'artiste et signe ici un grand film (1947). La trame est simple : en ce début de 20è siècle, un petit groupe de critiques littéraires et d'amateurs de théâtre souhaite imposer Ibsen et les grands européens sur les scènes japonaises dominées par le kabuki. L'un d'entre eux, Shimamura, choisit de monter la Maison de poupée et trouve au débotté une actrice géniale, Sumako (campée par celle qui va devenir l'actrice d'élection de Mizoguchi, Kinuyo Tanaka). Bien vite, le metteur en scène et l'actrice entament une liaison scandaleuse, Shimamura plaquant belle-mère, épouse et fille (dont il fait, à son corps défendant ,échouer un projet de mariage arrangé) pour partir en tournée avec sa muse. Après sa mort, Sumako reprend le flambeau avant, à l'issue d'une représentation sublime de Carmen, de rejoindre son amant dans la mort. Le film est touchant à plusieurs niveaux. C'est d'abord une magnifique histoire d'amour entre le raide intellectuel et l'émancipée fille des tréteaux et des projecteurs, histoire improbable qui conduit à la fusion des corps, des esprits et des sensibilités. C'est évidemment un manifeste esthétique, celui de l'artiste qui coupe les ponts avec une société dont les tabous et hypocrisies empêchent son épanouissement et sur laquelle il est en avance (voir comment il souhaite un mariage d'amour pour sa fille, dont celle-ci n'a cure). C'est enfin un admirable discours de la méthode sur l'art dramatique (les scènes de répétition sont plus fortes les unes que les autres) avec tout un jeu de miroirs subtil (les pièces jouées trouvent une résonance dans la vie des protagonistes ; les rapports entre Mizoguchi et Tanaka ne devaient pas être très différents de ceux de Shimamura et Sumako). Au plan du style, l'ensemble reste sage au regard des réussites totales des années 1950 mais on est plus très loin de la maturation définitive (le dernier quart d'heure en remontrerait à Sansho ou O'haru). A voir absolument.
Un chef-d'oeuvre qui mérite d'être découvert...
Mizoguchi développe dans ce film, comme dans bien d’autres de ses œuvres, un discours féministe et progressiste. Il veut nous montrer que la vie n’est pas un combat perdu d’avance, mais un chemin de persécutions. Celui qui désire vivre honnêtement doit accepter de se heurter à une dure réalité sociale. Cette opposition est superbement rendue par le jeu de Tanaka Kinuyo (Matsui Sumako) qui incarne ici avec brio une
beauté pathétique née des souffrances d’un Christ persécuté...
Sublime Sumako
Encore un film sur le thème, de la relation entre le metteur en scène et l’actrice, entre l’artiste et son modèle, thème qu’il avait déjà traité dans Cinq femmes autour d’Utamaro. La croyance dans l’art et dans la beauté, et plus précisément de la modernité dans l’art, oblige l’artiste à renier les traditions du Japon, l’honneur et le mariage. L’art régente sa vie, les pièces qu’il choisit sont résolument modernes, même si nous restons à l’époque Meiji (Ibsen dans un premier temps puis Carmen, occidentales toutes deux, qui renvoient aux influences contemporaines à la réalisation du film, à la présence américaine, qui oblige à privilégier le gendaigeki et les films à la gloire de l’occupant…). Chantre de la liberté et de l’amour, Hogetsu, se voit forcé de suivre ses idées, dans sa vie même, et par exemple de désintégrer son couple, au profit d’une relation fusionnelle avec son actrice. C’est cette muse qui lui a dicté cette conduite : lorsqu’il la découvre, elle est en pleine confrontation avec son ancien mari.
Abandonnant sa dignité d’homme et de professeur, il abandonne tout pour son amour du théâtre nouveau et Sumako, errant sur les routes avec sa compagnie. Il meurt, tandis que peu de temps après sa femme l’accompagne dans la mort en se suicidant après une représentation de Carmen, n’envisageant pas de vivre sans la présence de l’être aimé, son indispensable complément.
Tout comme dans Utamaro, Mizoguchi, traite des relations de l’art et de l’artiste, avec les valeurs japonaises, encore ancrées dans les traditions et les préjugés. Il démontre l’impossibilité pour les artistes de rester dans ces présupposés et ces cadres imposés. Si la suite est tragique dans la plupart des cas, l’art en sort grandit. Il invite toujours à se libérer du carcan, que ce soit pour l’homme ou la femme.
Seuls contre tous
La vie romancée de la véritable actrice de théâtre Sumako Matsui répond étrangément au film antérieur de Mizoguchi "Contes des Chrisanthèmes tardifs".
Une nouvelle fois, el réalisateur dépeint une femme forte, totalement dévouée à son mari, mais également à l'art, autre thème si cher du réalisateur.
Dépeignant la vie de la femme à partir de son implication au mouvement émergeant du théâtre moderne, Mizoguchi rompt avec ses films historiques et de son amour pour le théâtre kabuki pour dresser un parallèle avec ses propres oeuvres, à savoir la représentation moderne d'une époque passée.
Comédie de moeurs, le réalsiateur s'attache également à décrire la difficle condition d'une femme et d'un couple trop progressiste par rapport à des codes et institutions solidement ancrés. Leur affaire fait scandale et ce n'est que par leur seule perséverance et efforts - qu'ils payeront par leur vie - qu'ils réussiront à s'imposer dans une société renfermée sur elle-même.
Seul pêche une nouvelle fois le portrait trop rapidement brossé au profit des scènes simplement tragiques; la relative courte durée et les nombreuses ellipses temporelles ne rendent également pas tout à fait justice à la difficle vie qu'ont dû méner les véritables protagonistes.
Un film solide et une puissante refléxion, mais une oeuvre mineure dans la filmographie du grand réalsiateur.