Un portrait sur la jeunesse aussi fascinant que déroutant.
Les années 60 sont vraiment une belle période chez le cinéaste. D'une part, il propose enfin de superbes compositions au scope (l'une des plus belles restera sans doute Filles, épouses et une mère) et d'autre part ses métrages prennent cette espèce de dimension tragicomique qu'on ne trouvait avant malgré la gravité et la dureté des thèmes abordés (querelles de couple, problèmes économiques, etc...). Cet Approche de l'automne s'avère être l'un de ses plus beaux films, distillant avec précision et densité des émotions aussi légères que délicates. Délicates car on ne sait pas trop où se placer devant ce métrage. On ne sait pas trop si il faut rire ou s'indigner devant les personnages méchamment travaillés alternant le bon et le moins bon. On y trouve deux gamins (Hideo et Junko) qui représentent l'espoir, la nouvelle génération japonaise en quelque sorte, tandis que les adultes, eux, prennent les choses à la légère, abandonnent leur gosse et les privent de liberté.
Sous ses airs de comédie géniale, L'approche de l'automne dessine un portrait pessimiste de la société japonaise en y incluant des protagonistes bidons, je-m'en-foutistes et laissant leur môme vaquer à des occupations pour le moins douteuses. Nul ne s'occupe de son enfant, pas même Shigeko qui après l'avoir confié à son oncle finira par l'abandonner lâchement en plein métrage pour ensuite disparaître totalement de l'oeuvre avec un inconnu qu'elle courtisait depuis peu. Un traitement grotesque infligé aux personnages sauf aux enfants, à ces deux adorables gosses. Hideo est un peu niais mais attachant, quant à Junko, elle brille par son incroyable joie de vivre et par sa naïveté/générosité éclatantes. Rarement aura-t-on vu chez le cinéaste pareils mômes, à des années lumières de la lâcheté des adultes. Même le cousin d'Hideo âgé d'une vingtaine d'années finira par le lâcher pour aller s'amuser avec ses ami(e)s, alors qu'il devait l'accompagner un jour de congé pour dénicher un scarabé dans les coins verts de Tokyo.
L'approche de l'automne est donc une oeuvre clé dans la filmographie de Naruse pour la simple et bonne raison qu'elle marque les esprits par son incroyable contraste entre la joie et la tristesse. Des émotions qui se résument par des petites séquences formellement simples mais dans le fond terriblement graves. On en est même à se demander si Hideo ne va pas à son tour tomber dans la lâcheté. Il cherche sans cesse son scarabée tout comme il cherche sa mère (qui ne peut pas s'occuper de lui à cause d'un travail conséquent). En fin de métrage il repense à sa mère qui l'a abandonné...abandonnera t-il lui aussi son scarabée récemment retrouvé en guise de mécontentement ou de protestation? Ca on ne le sait pas car le film se boucle ainsi, en laissant de nombreuses questions sans réponses, mais qu'importe, c'est là toute la force du métrage, une force qui réside dans cette fin aux multiples interprétations. Au commencement on y trouve des enfants joyeux et plein d'espoir, des comportements qui changeront rapidement à l'image de celui des parents, laissant des mômes errer sur la plage ou sur des toits d'immeubles, finissant même par se blesser car non encadrés.
Merveilleux, tour à tour drôle, intimiste et infiniment grave, L'approche de l'automne est une merveille absolue, peut être l'un des meilleurs films du cinéaste qui étale sur 1h20 une triste image de l'adulte, facteur de toutes les déceptions (Junko qui ne peut pas avoir Hideo comme frère car ses parents ne le veulent pas) et de toutes les contraintes.