Desireless world
Nia Dinata est une réalisatrice et productrice, dont l'apport au seul cinéma indonésien – et ce malgré son relatif jeune âge – est d'ores et déjà inestimable.
A chaque nouveau projet, elle se bat pour la cause de la femme, au risque de s'attirer les foudres (et menaces de mort) des groupes islamistes fondamentaux et tout simplement des "bonnes" instances de son pays. C'est ainsi, qu'elle filme le premier baiser gay du cinéma indonésien dans son sulfureux "Arisan" (coécrit par Joko Anwar !), qu'elle s'attaque au sensible sujet de la polygamie avec son magnifique "Love for share" ou qu'elle produit l'hilarant "Quickie Express" mettant en scène des gigolos…
Son dernier tour de force: produire les documentaires signés par quatre jeunes réalisateurs amateurs, qui avaient participé à l'un de ses ateliers de cinéma. Si la qualité de chacun des segments est inégale, les thématiques sont toutes édifiantes…et il ne faut jamais oublier le courage que nécessite le tournage de tels sujets dans un pays de plus en plus totalitaire et extrémiste…
Un coup de chapeau autant pour le courage de Nia de défendre les valeurs des femmes et à ces jeunes de reconnaître la nécessité d'aborder ces sujets et de perpétuer l'héritage de leur mentor.
Les différents segments s'attachnet ainsi à décrire un amour lesbien de travailleuses indonésienens à Hong Kong; à montrer le cas de conscience d'une jeune femme (vierge) à se faire enlever une tumeur (sans doute d'ordre cancérigène) avec le risque d'abimer son hymen, donc de la rendre "impure" avant son mariage; à aborder le délicat sujet de l'excision féminine, nécessaire pour enlever ce bout de "supériorité féminine" selon quelque idéologie religieuse…ou encore de filmer en caméra caché le véritable chemin de croix pour aller voir l'un des 2000 gynécologues (pour 200 millions d'habitants) pour une simple visite de routine, lorsqu'on est mineure et pas mariée…
Il y a quelques longueurs, des inégalités dans la manière d'aborder efficacement (ou non) ses sujets…mais l'entrevue dans une société largement méconnue et avec des valeurs tellement désuètes pour un pays dit "civilisé au XXIe siècle, qu'il ne faut absolument pas rater le visionnage d'une telle œuvre et – mieux – de s'en faire porte-parole pour le montrer au plus grand nombre de personnes et tenter de faire bouger les choses à son tour.