Xavier Chanoine | 4.25 | Une chronique adorable. |
Tenebres83 | 4.75 | |
Ordell Robbie | 4.25 | Pet de génie |
MLF | 5 | |
==^..^== | 4 | Petites histoires de voisinage futiles et innocentes. |
Avant de commencer j'en profite pour signaler aux parisiens de souche ou parisiens de passage que le cinéma Mk2 de Hautefeuille à Paris (Métro St-Michel) diffuse depuis quelques temps un cycle consacré à Ozu, retraçant quelques uns de ses meilleurs films ( Gosses de Tokyo, Il était un père, ...) avec une séance pratiquement tous les jours. N'hésitez donc pas.
Ca y est je m'en souviens. C'était il y a quelques années sur Arte en prime time. Je me souvenais de ces gosses capricieux, de ces intérieurs tout petits formidablement filmés, de cet homme saoul se trompant de maison...oui c'était bien Bonjour de Ozu Yasujiro, une chronique sociale formidable, emprunte d'une énergie et d'une joie de vivre qu'il est bon de voir, de sentir. N'allez pas chercher plus loin que la simplicité et le regard d'Ozu porté sur cette famille bien portante, ce dernier prenant le temps d'épier chaque conversation et chaque commérage par le biais de sa caméra, tout en retenue et en délicatesse. Les plans sont comme à l'accoutumer chez le cinéaste, fixes et très strictes laissant peu de place aux protagonistes pour s'exprimer dans un seul même plan. Une technique efficace puisqu'elle permet de s'intéresser à chaque personnage de l'histoire, et rendre ainsi les séquences de dialogues pêchus et vivantes. On est loin de l'intro de Kagemusha de Kurosawa avec son plan fixe sans coupe de 10 grosses minutes.
Au niveau de la trame, pas grand chose à dire dans la mesure où il n'y en a pas. On suit simplement le quotidien d'une famille qui refuse d'évoluer malgré leur situation plus qu'honnête. Une situation que ne supportent plus les deux enfants, absolument adorables et criants de naturel, poussés à se taire pendant plusieurs jours suite à la colère de leur père refusant de leur acheter une télé. Les deux gosses passaient en effet leur temps devant la télé de leur voisine, à regarder des matchs de sumo au lieu de faire leur devoir d'anglais. En récapitulant, les enfants ont décidé de se taire jusqu'à nouvel ordre, tout ça pour avoir une télévision. Un drôle de paradoxe puisqu'ils coupent alors toute forme de communication pour avoir en retour le plus pur objet de communication existant sur Terre à l'époque, avec la radio. Parait-il que cet objet en question rend bête, Ozu avançait déjà cette théorie à l'époque, ce qui est un poil avant-gardiste quand on sait que la télé est finalement un objet de communication à double tranchant puisque chacun est libre de véhiculer ses idées, qu'elles soient bonnes ou mauvaises par le biais de l'image.
Mais cette dénonciation ne prend pas beaucoup de place comparé au ton volontairement comique que prend l'oeuvre, exagérant à peu près toutes les formes de comique possibles, avec son lot de pétomanes, de personnages ivres et de commérages qui prennent une ampleur pas possible. Saluons pour cela la formidable interprétation, en particulier les deux frères dont le plus jeune n'a pas finit de nous faire éclater de rire grâce à sa bonne bouille et ses mimiques franchement adorables. Vraiment, il n'y a rien à reprocher à Bonjour si ce n'est ses logiques petites baisses de rythme, difficile en effet de tenir en haleine le spectateur peu patient face aux potins que se racontent des femmes au foyer. Il y a dans Bonjour tout ce que dont peut raffoler l'amateur de cinéma japonais classique. Les portraits de femmes sont aussi riches et denses que ceux des hommes, il n'y a pas de préférences quelconque même si le récit s'axe d'avantage sur les enfants. Pour finir, parlons un peu de cette mise en scène très riche, beaucoup plus que l'on ne pense. En effet, les décors ont beau être très classiques (intérieurs de petites bicoques), ils n'en demeurent pas moins très détaillés (surtout au niveau des couleurs) leur donnant presque un aspect labyrinthique; de plus la caméra se place à tellement d'endroits différents qu'elle donne l'impression de sans cesse renouveler le décor alors que tout ceci n'est qu'illusion, pas étonnant quand on sait que Ozu est l'un des maîtres en la matière.
Un film drôle, moderne et emmené par deux gamins formidables.
Esthétique : 4/5 - Ce qui étonne le plus, c'est cette formidable palette de couleurs. Vraiment. Musique : 3/5 - Très peu présente, juste là quand il faut soutenir les moments comiques. Interprétation : 4.5/5 - Interprétation de grande classe, pleine de vie. Mention pour les gamins. Scénario : 4/5 - Chronique intelligente et intéressante sur le progrès au sein d'une famille banale.
Cet Ozu-là tire son caractère atypique d'etre une pure comédie là où meme lorsqu'on rit dans le reste de sa filmographie couleur la mélancolie n'est jamais loin. Et surtout de son humour plus proche de celui des comédies à succès nipponnes de l'époque que de la subtilité ou du burlesque classique habituel chez Ozu: le principal ressort humoristique du film (pas finaud mais jamais navrant) passe par la pétomanie de certains de ses personnages. Elément plaisant parce que humanisant Ozu, le rapprochant du peuple qu'il évoque dans ses films en cassant son image d'artiste austère que les critiques sanctificateurs lui ont collé. Reste que Ozu réussit aussi très bien la dimension de commentaire social. L'annexe est évidemment ici très intéréssant: les observations sur les commérages de voisinage, sur la méfiance vis à vis des voisins occidentalisés, l'apprentissage et l'usage de l'anglais par les gamins amenant quelques moments comiques, le regard des enfants sur le monde des adultes, la télévision symbole de la société de consommation des fifties désirée par les jeunes générations.
On retrouve avec plaisir le talent de directeur d'acteurs enfants déjà entrevu dans la période muette du cinéaste. Et la Ozu's touch maitrisée sur une durée assez courte à une échelle Ozu période parlante, durée évitant le trop de prolifération de plans longs légèrement trop longs; néanmoins, le film aurait peut etre gagné à avoir un rythme un petit peu plus alerte qui aurait accru son efficacité comique. Reste qu'il s'agit d'un Ozu atypique, très accessible qui pourrait casser quelques clichés sur le cinéaste présents chez les réfractaires à son style. Et aussi d'un film prouvant que Kitano n'était pas le premier grand cinéaste japonais à aimer la poésie et les gags scatologiques.
Rien de spectaculaire dans ce film. Ce n'est vraiment pas l'action qui est au coeur de cette production. Le contenu est en fait purement descriptif. Au travers de quelques affaires de commérage et le comportement capricieux des deux garçons, le réalisateur nous offre un instantané de la société de la fin des années 50. L'arrivée de l'électroménager et surtout de la télévision annoncent les prémisses de la société de consommation telle que'on la connaît de nos jours.
Ce qui est assez amusant ou plutôt intéressant de remarquer, c'est que, mis à part l'architecture des maisonnettes, toutes ces situations pourraient tout à fait se rencontrer en Europe ou même aux États-Unis. Comme quoi l'homme a bien toujours les mêmes réactions et besoins quelques soient les cultures.