Un été avec qui ?
Une des réussites animées cinéma de l'année 2007 au Japon, Un été avec Coo, est sorti dans nos salles en septembre dernier, toujours sous la houlette du couple Kaze/Eurozoom. Précédé d'une réputation plutôt flatteuse sanctionnée par quelques prix glanés dans divers festivals, le film de HARA Keiichi est de ces oeuvres alliant intégrité artistique et vocation grand public avec brio.
Projet porté pendant plus de vingt ans par son réalisateur, Un été avec Coo est l'adaptation de deux romans de l'écrivain KOGURE Masao, Tumulte autours d'un kappa et sa suite L'étonnant voyage d'un kappa. Comme l'indiquent les titres, les romans comme les films mettent en scène le destin d'un jeune kappa orphelin, perdu dans notre époque moderne. Figure classique du bestiaire fantastique japonais, le kappa est une créature à la croisée d'une tortue et d'un batracien à l'allure bipède pour son apparence, un personnage récurrent du folklore populaire, familier à tous les japonais. Malgré cela et comme l'explique HARA, le projet d'adaptation animée de Coo a connu beaucoup de difficultés avant de se monter, butant sur la réalité d'une industrie de l'animation japonaise majoritairement tournée vers la consommation et adeptes de « formules » sans risques : un manga ou personnage connu comme base, des designs à la mode et un public ciblé. Un cahier des charges auquel ne collait pas Coo, mais fort de ses succès critiques et au box-office avec ses films tirés de la franchise Crayon Shin-Chan, ultra-populaire au Japon, HARA, après deux décennies de bons et loyaux services au sein du studio Shin-ei Animation (Doraemon), voyait enfin son projet se concrétiser. Une récompense méritée pour ce réalisateur et animateur talentueux, proche ami d'un autre génie de l'animation japonaise, YUASA Masaaki (1), et qui aura réussi avec Coo à s'attirer les louanges de nombre de ses pairs, dont la statue du commandeur de l'animation qu'est le compère de MIYAZAKI, TAKAHATA Isao.
Des louanges justifiées. Film tout public jouant sur de nombreux registres – fantastique, comédie, drame, critique sociale et sous-texte écologique..., Coo brasse large et touche souvent au but dans ses intentions. Le film prend son temps (2h 20 quand même), s'attarde sur le quotidien des personnages et construit très bien ses nombreux enjeux narratifs, comme le rejet de la différence à travers les destins croisés de Coo et de l'amie de Kôichi, Sayako. Coo ne regorge pas de scènes d'animation "m'as tu vu excitée du bulbe", mais certains passages son particulièrement soignés, avec un travail sur les décors de premier plan et une animation des personnages, sur certaines scènes, tout en subtilité. Nantis de design réalistes pour les personnages et évitant la facilité d'un kappa à l'apparence d'emblée séductrice, « kawaï », le film fonctionne d'autant mieux sur le plan dramatique. HARA Keiichi a su s'entourer pour l'occasion, avec notamment à la direction artistique une figure de l'animation japonaise comme NAKAMURA Takashi.
Un été avec Coo est un film plein d'humour et émouvant, intelligent et sensible dans son propos comme dans sa mise en scène, qui n'hésite pas à montrer la violence quand elle surgit tout en évitant toute complaisance. On attends maintenant le prochain long de HARA Keiichi avec encore plus de curiosité, un film déjà en route pour l'écriture du scénario (2) et qu'il réalisera cette fois-ci en tant qu'indépendant et non plus comme employé d'un studio...
Notes :
(1) Les deux ont travaillé ensemble sur diverses productions liées à Shin-Chan. Pour l'anecdote, il faut savoir qu'HARA avait demandé à YUASA de lui pondre quelques designs pour le personnage de Coo, mais qu'il ne les avait pas retenu en raison du caractère un peu "too much" de ces derniers, explique t-il en riant. De toute façon citez le nom de YUASA devant HARA et le voilà qui s'anime soudain...
(2) Un été avec Coo n'a d'ailleurs pas été scénarisé de façon classique. En réalité il n'y avait pas de scénario en tant que tel, mais plutôt un synopsis, un traitement. HARA est directement passé à la phase du storyboard en sautant la case scénario, une habitude prise sur les films Shin-Chan pour des questions de contraintes de temps. Mais ce qui fonctionnait sans problème pour des univers familiers et déjà définis est devenu une grosse difficulté pour Coo. Étonnament, on ne le ressent pas à la vision du film. HARA a ainsi procédé à son "montage" final sur la base d'un storyboard qui amenait un film d'une durée de 3h...
04 octobre 2008
par
Astec
Coo le kappa d’bol
Coo, en plus des critiques déjà lisibles sur Cinemasie, on l'a déjà bien présenté
ici.
L’affiche vante le film en s’aidant du parrainage prestigieux d’
Isao Takahata, avec comme citation du maître :
« un chef d’œuvre », un jugement sans appel et, du coup, difficile à remettre en cause. Bien que l’on comprenne aisément ce qui a pu plaire à notre ponte des studios Ghibli, à savoir une nouvelle approche du bestiaire légendaire japonais après son
Pompoko et ses joyeux tanukis écolos, cette appellation contrôlée relève de l'exagération caractérisée (si, si).
Le film est trop long, l’animation pas toujours au top, on peut trouver les dessins assez moches et la mise en scène plan-plan. L’histoire regorge qui plus est des poncifs du genre (le gamin qui courre et perd sa casquette en pleurant, bravo), le genre étant : un p'tit bonhomme rencontre une créature extraordinaire et s’en amourache. E.T est déjà passé par là, le truc on le connaît et il n’y a pas ici de quoi enrichir le concept. Et, non, l’abus de violons sur la BO n’enrichit pas, loin s'en faut.
Pourtant, dur il est de ne pas reconnaître que ça fonctionne plutôt bien. Le petit kappa est franchement touchant, sa famille d’accueil des plus craquantes. Cette histoire paisible, blindée de bons sentiments, use certes à l’excès du pathos mais efficacement : on laisse parfois couler une petite larme, ce bien évidemment pour nourrir le kappa en la laissant tomber sur le haut de son crâne. Quoi que, attention : elle n’apprécie guère le sel cette mignonne bestiole d’eau douce, que les enfants, à n'en pas douter, adorent.