Si Fat Choi Spirit n'est pas une réussite majeure de la Milkyway, il reste néanmoins une comédie très regardable, pas transcendante mais rendue intéréssante par son casting ainsi que sa mise en scène. S'il n'atteint pas les sommets d'hilarité des Farelly ou d'un Chow Sing Chi lorsque ces derniers sont en grande forme, Fat Choi Spirit demeure agréable à regarder et ne contient pas trop de lourdeurs.
Tout d'abord, on constate avec plaisir que le film a bien la signature Milkyway: la photographie bleutée des séquences de nuit nous rappelle l'ambiance des meilleurs polars de la maison. Et, si la musique joue un rôle moins important que dans Running out of Time 2, force est de reconnaître que Raymond Wong continue dans les choix décalés et audacieux. Les sifflements pendant les parties de Mahjong, l'utilisation de cordes aux accents conquérants évoquent irrésistiblement les meilleurs scores de westerns spaghettis et créent de façon bienvenue l'intensité des face à face. Mais Raymond Wong nous réserve sa meilleure cartouche pour la fin du film et où intervient... une relecture poilante du thème d'Il était une fois en Chine. Presque aussi efficace et décalé que l'Internationale...
Ensuite, on a droit à des performances d'acteurs d'un bon niveau dans l'ensemble: Andy Lau est formidable d'impassibilité et de décontraction (bien plus convaincant que dans FTK), Lau Ching Wan prend le plan en otage à chaque apparition et offre un numéro gangsta rap (avec chaines en or et bonnet à la Ali G) à la limite du cabotinage mais toujours poilant, Louis Koo est correct, Gigi Leung ne réédite pas sa bonne performance de A War named Desire et cabotine par moments beaucoup trop comme le reste du casting. Mais le tenues vestimentaires du gang de Lau Ching Wan (total look hip hop) ainsi que les multiples métamorphoses de Gigi (stewardess, policière) déclenchent surprise ou hilarité. Mais cela ne va pas sans quelques idées lourdes et grotesques qui nous rappellent que comédie cantonnaise et légèreté ne font pas toujours bon ménage: Gigi Leung siliconée, le slip porté SUR le pantalon par les membres du gang. Et le scénario pèche par excès de rebondissements et une psychologie sommaire des personnages ce qui finit par irriter par moments.
Mais le point le plus intéréssant du film est sans conteste sa mise en scène qui recycle habilement les effets de signature scorcésiens: au début du film, la caméra se rapproche de façon rapide et frontale des personnages et durant les parties de mahjong elle passe très vite d'un personnage à l'autre, d'un jeton à l'autre et crée le dynamisme de la partie avec une certaine virtuosité, tourne autour des personnages pour nous faire partager leur tension. Une belle idée (originale celle-là) de mise en scène est le plan de très loin sur Andy Lau allongé avec sa famille suivi d'un rapprochement progressif et voyant qui nous fait ainsi ressentir leur intimité et leur isolement. La caméra arrivant verticalement et en spirale sur Louis Koo ainsi que le ballon de football le heurtant à la vitesse de la lumière (petit clin d'oeil à Chow Sing Chi) sont également des idées bienvenues. S'il n'est pas un maître de la comédie, To aura au moins compris (contrairement à la totalité des réalisateurs français de comédie de ces dernières années) que la situation la plus hilarante ne saurait se passer d'une réalisation digne de ce nom.
Au final, si To n'innove pas comme dans ses meilleurs polars Milky, il vient d'offrir un divertissement correct dont la limite est néanmoins de ne pas laisser de grosse trace une fois le visionnage achevé.
La Milkyway continue sur sa lancée de comédies, seul genre encore rentable dans les salles. Ce n'est pas la comédie de la décennie, mais pour peu qu'on soit familier avec le cinéma de Hk et la culture, on passe un très bon moment.
Ce prérequis n'a rien à voir avec le scénario, plutôt basique. Inutile de chercher midi à quatorze heure à ce niveau, c'est le mélange habituel comédie et romance, avec quelques moments tendres, des clins d'oeils, des moments drôles (mais rarement hilarant, Johnnie To n'étant pas un maître de la comédie), peu de longeurs. L'histoire en elle-même est d'un inintérêt assez profond, car elle se réduit à deux lignes et on sait à l'avance comment tout va se finir.
Pour rattraper tout ça, il faut du rythme, de la bonne humeur, de bons acteurs, et un emballage paquet cadeau pour le nouvel an. C'est réussi à mon avis, sans que le film ne réussisse à entrer dans le groupe des meilleurs comédies HK. Il lui manque cet absence de retenu, ce côté non-sensique à la Stephen Chow qui aurait pu le propulser bien plus haut. Mais To n'est pas Chow, et livre toujours des films drôles à défaut d'être drôlissimes. Sa réalisation est sans génie bien sûr, mais très efficace, avec quelques plans très sympathiques, notamment sur les cadrages sur les visages. On pourrait dire la même chose de la musique de Raymond Wong, rien de nouveau sous le soleil, mais c'est efficace. On reconnaît tout de suite le style du compositeur, et comme souvent ses hommages à d'autres genres, comme ici le western pour illustrer le face à face final (hommage à Morricone) ou les "Il était une fois en Chine" avec le thème de Wong Fei-Hong pour clore le film.
Les hommages sont un des autres petits plus du film, avec surtout ce final/parodie de Wong Fei-Hong sur la plage. La Milkyway a souvent placé des hommages dans ses comédies (voir la moto dans Needing You, le foot avec la boule de papier dans Love on a Diet), et Fat Choi Spirit continue sur cette lancée.
Au niveau casting, on passe sur Louis Koo et Cherrie Ying, corrects mais leur couple ne décolle jamais vraiment. Andy Lau est bon, mais pas autant que dans Love on a Diet, c'est évident. Après ces quelques interprétations sans gros impact, passons aux deux plus grands plaisirs du film, Gigi et Ching-Wan. La première surprend en se lâchant et plutôt bien, le second ne cesse de surprendre dans un rôle également plus débridé que les autres. Ces deux-là pimentent le film énormément. Certes, j'adore Gigi, je reconnais qu'elle ne sera probablement jamais une grande actrice, mais que de chemin parcouru depuis fond du fossé de l'inexpréssivité dans lequel elle était tombée quand elle était petite. Ici elle est craquante en amoureuse d'Andy, changeant de travail tous les jours (hôtesse, flic, inspectrice des impôts, "big boob con"...), de même que de coupe de cheveux et de tour de poitrine (Gigi en 95D il faut le voir). Bref, ce rôle de gentille hystérique lui va à ravir. Gigi, je t'aime. Quand à Lau Ching-Wan, je l'aime aussi, mais d'une autre façon bien sûr. Ici il est terrible en sale gosse, arborant des tenus toutes plus ridicules les unes que les autres (voir la page commentaire...), et accompagnant le tout de mimiques assez hilarantes. Bref, il s'amuse et nous amuse.
Autre point de discussion, les parties de Mahjong. Alors à la question faut-il connaître ce jeu pour profiter du film, ma réponse est évidemment OUI. Faut-il connaître le Mahjong sur le bout des doigts, non. Mais les règles de base me semblent obligatoires. Il y a beaucoup de parties dans le film, et on ne peut en comprendre les enjeux sans un minimum de connaissances. Pensez aux God of Gamblers, et demandez-vous si vous profiteriez autant des films sans connaître les règles du poker par exemple. Ici les parties sont moins délirantes que dans les meilleurs Gambling movies, mais elles restent sympathiques, jamais trop longues, toujours assez dynamiques.
Au final, vous aurez compris que si vous avez un minimum de culture HKgaise, vous pourrez profiter des parodies, comprendre les parties, et apprécier les interprétations des stars du film. Le débutant prendra nettement moins de plaisir dans le film par contre. Surtout que c'est un petit film, tourné assez vite, avec un scénario peu écrit. Mais c'est bien réalisé, très bien interprété par les seconds couteaux Gigi et Ching-Wan, c'est drôle, c'est bêtement romantique, bref, gros capital sympathie sans être un chef d'oeuvre.
Après tous les films de gamblings que l'on avait pu nous servir, on avait du mal à croire que ce genre pourrait encore surprendre, et pourtant, Johnnie To Kei-Fung & Wai Ka-Fai s'empare si bien du genre que le resultat s'avère étonnant. En effet, après le tout premier God Of Gamblers, puis les Casino Raiders, puis les Conman, Andy Lau Tak-Wah paraissait avoir interpreté une panelle de joueurs très varié et presque complète....et bien non, car Fat Choi Spirit n'a rien du film de gambling typique et apporte un nouveau type de joueur.
Tout d'abord, les séduisantes cartes laissent place aux culturelles pièces de mah-jong et l'ambiance glamour des To San cède la place à une atmosphère beaucoup plus réaliste. L'histoire est pourtant sensiblement la même, on suit un personnage indéfectible au jeu (ici Andy Lau), sauf que là où To-San voyageait dans le monde entier et gagnait des millions, Mahjong Warrior (Andy) joue avec riches comme moins riches et ne dis jamais non à une petite partie entre deux trucs à faire. Certes les cartes (poker ou autres) peuvent rapporter beaucoup plus d'argent que le mahjong, beaucoup plus populaire ; néanmoins je pense que c'est plus le choix de faire simple qui amena Wai Ka-Fai et Yau Nai-Hoi (les deux scénaristes habituels de la Milyway) au mahjong plutôt que l'inverse, à savoir que le fait que ce jeu soit moins enrichissant ait amené ce traitement simple et réaliste. Andy posséde une famille (sa mère et son frère), ca ne se passe pas bien avec sa petite amie, en somme, la vie pour Mahjong Warrior n'est pas toute rose. Et surtout on apporte ici un élément qui n'était pas présent dans les God Of Gamblers : la défaite. On apprend ainis qu'Andy n'a pas toujours été un gagnant et qu'il fut même un looser aux grosses dettes pendant longtemps. Il dit également tout le long et c'est même la raison pour laquelle il repousse Gigi Leung Wing-Kei, "Un bon caractère fait un bon joueur", ce qui n'est pas le cas de la schyzophrène Wing-Kei. Il lui apprend que même si il gagne toujours, la défaite ne lui fait pas peur, et qu'au contraire (et il le montrera) il aime jouer avant tout, qu'il perde ou gagne.
Andy est assez inégal, il se montre peu convaincant à certains moments comme les retrouvailles avec sa mère et à tendance (comme toujours) à trop se regarder en jouant mais se trouve excellent dans les scènes de jeux, avec des regards et des expressions très réalistes, que ce soit dans la victoire facile comme dans la défaite fair-play. Mais il est évident que Gigi même si elle use par moments mais surtout Lau Ching-Wan remportent la palme pour leur jeux exhubérants et leur looks délirants (Gigi se la joue Brachetti et Ching-Wan donne plutôt dans le West Coast Gangsta).
En Bref, le film a le mérite de reprendre le concept du joueur infaillible à la To-San mais en révolutionnant modestement ce genre car Fat Choi Spirit, en plus d'acteurs très bons et d'une ambiance sympathique, apporte de nouvelles perspectives au Jeu avec un grand J, comme accepter la défaite. En revanche, pour ceux pour qui le mahjong est toalement inconnu, il sera évidemment dur d'adhérer à la tension lors des parties, cepandant pour les plus courageux et pour ceux qui connaissent vaguement, les "Characters", "Circles" ou autres "Fat Choi", foncez, c'est rafraichissant.