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Gips
les avis de Cinemasie
3 critiques: 2.83/5
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4 critiques: 3.5/5
Efficace dans l'humour noir, mais trop simpliste
Si ce film dérangeant est évocateur d'une certaine forme d'autisme envers la société actuelle, il n'en demeure pas moins nourri de carences du fait de son pitch minimaliste tendant vers l'absolue errance de deux femmes enfermées dans leur monde : si l'une, Tamaki, tente d'exister ou de se donner une conscience en s'obligeant à porter des béquilles (parait-il que ça lui porte chance), l'autre, Kazuko, ne semble pouvoir exister (ou prouver son existence?) uniquement par l'intermédiaire de cette première : on ne sait pas bien quels sont leurs penchants sexuels, deux femmes au destin peu appréciable, l'une multiplie les conquêtes sans que l'on en sache davantage, l'autre a son petit ami qu'elle ne voit qu'une fois par semaine. Shiota Akihiko perpétue aussi à travers ce portrait de "rebelles de la société" cette belle évocation de l'amour et la douleur moins imagée que dans son précédent et moyennement réussi
Moonlight Whispers mais qui trouve ici une justification plus précise : elles tentent d'exister en enchaînant les prises de risque, et se retrouvent déliées lorsque Kazuko (l'excellente et mystérieuse Machiko Ono) découvre que Tamaki a commi un meurtre. Pour l'humilier, Kazuko décide d'envoyer des lettres de menace à cette dernière qui ne semblent pas la gêner plus que ça. Mais cette menace, payer deux millions de yens sous peine de divulguer l'identité de la meurtrière, entraînera une nouvelle vie pour les deux femmes, celle de voler le moindre gentleman qui aura reçu les avances d'une d'entres elles, en l'électrocutant au tazzer. Si la démarche est amusante, donnant lieu à quelques séquences plutôt inspirées dans le registre de l'humour noir, l'ensemble manque de piquant et de variété visuelle : Shiota use d'une caméra amateur pour capter le quotidien des deux femmes, et si son utilisation reste légèrement ironique (les derniers plans sur Kazuko en fauteuil roulant), elle aurait pu davantage accentuer cette même ironie , le cinéaste se contentant de bien filmer, sans trop tomber dans l'épate ou le clinquant faciles, mais de manière trop académique.
Fais moi mal, amie amie...
Sacré Shiota : ce réalisateur nous plait décidemment de plus en plus, car ce film mélange les situations sado-maso et l'humour à froid de son premier film, Moonlight Whispers, et la construction implacable, musicale, de Harmful Insect. Gips est très drôle, malin, subtil, mine de rien très maitrisé, jusque dans son dénuement. Le film tire vers l'abstraction mais n'est jamais un objet de laboratoire, grâce à deux actrices aussi craquantes que retorses. Gips distille peu à peu une banalité dans l'étrange, une acceptation douce de la folie furieuse. A la fin, deux lesbiennes s'aiment en chaise roulante et béquilles, chacun ayant infligé à l'autre ses blessures. Akihiko Shiota nous dit qu'on ne peut aimer que dans le mensonge et la douleur, ce qui était d'ailleurs la théorie inverse d'un autre film japonais présenté en même temps à Panasia, A woman's work. On se sent presque bien dans le monde clos et glacial de Gips, gouverné par deux tarées. C'est grave, docteur ?
Bandage Club
Akihiko Shiota profite de sa participation à la série des "Love Cinema" (il a fait partie de la "troisième vague" de films, en même temps que le tournage de "Visitor Q" de Miike) pour mettre une nouvelle fois en scène une relation sado-masochiste entre deux femmes après sa toute première production pinku (et vidéo) "The Nude Woman" (une femme mariée devient l'amie d'une exhibitionniste et se prend elle-même au jeu) et son précédent "Moonlight Whispers". Il demande à l'une de ses étudiantes de son cours de cinéma de réécrire son idée originale avant d'en assurer la réécriture pour les besoins de l'adaptation finale.
Moins romantique que "Moonlight Whispers", le film est également plus difficilement accessible en raison de sa réalisation en format DV pas tout à fait adapté au style: fait des longs plans fixes, le travail de l'image sur pellicule aurait sans aucun doute conféré une ambiance plus particulière; en l'état, le ton est clinique, froid, distant, tout à l'image de cette curieuse relation entretenue entre les deux filles.
Une nouvelle fois, Shiota réussit à traduire le mal-être de certains adolescents par ses propres métaphores: la jeune et timide Tamaki est attirée par le paraître de Kazuko (une jabme dans un plâtre, "Gips" voulant dire, "plâtre" en allemand); mais finalement elle va "dépasser" son "maître" en fin de film, qui – elle – avance, certes, symboliquement dès le début du film, mais est finalement bien plus handicapée par son plâtre, qu'il ne la fait aller de l'avant.
Production indépendante oblige et véritable univers d'un artiste confirmé, "Gips" exige une approche plus réfléchie, que des productions plus commerciales; mais Shiota se pose immanquablement comme en véritable porte-voix de toute une génération.
aime moi
Ne cherchons pas bien loin,
Shiota n'a pas son pareil pour mettre en scène des relations hors-normes et ambigues. Alors même s'il ne sait parfois pas trop faire de son cadre (c'est pourtant rare chez lui) on lui pardonne bien vite, car le bonhomme raconte sacrément bien. Entamé doucement, avec juste un petite touche d'étrangeté,
Gips se trouve vite être étonnant, voir même fascinant - en plus d'avoir un final beau et douloureux, qui rappelle d'ailleurs celui de
Insecte nuisible par sa brutalité et sa capacité à, mine de rien et avec une économie de moyens peu commune, totalement stupéfier son spectateur.
C'est malheureux de dire des choses pareilles, mais
Shiota me laisse sur les rotules et j'aime ça.
29 juillet 2007
par
Epikt