Un Cœur d’or n’aura jamais aussi bien porté son nom. Mais la réalité est tout autre puisqu’il ne suffit pas de présenter une galerie de personnages généreux et bons pour en faire un vrai film de cinéma. A contrario du nombre toujours aussi élevé de films du mainland démontrant la dure réalité du peuple chinois, sur les plans économiques et sociaux, Un Cœur d’or est un vrai film de fiction. Le genre de traitement que l’on retrouve dans un format court, celui d’une série télévisée par exemple. Des villageois n’hésitent par exemple pas une seconde à donner toutes leurs économies –durement gagnées comme il est très souvent répété- pour permettre à une jeune femme d’hospitaliser en urgence son bébé asthmatique. La jeune femme, fragile et paniquée, se rend compte qu’elle n’a plus l’argent sur elle une fois arrivée à l’hôpital, fraîchement déposée par un taximan généreux –au grand cœur donc, qui passait par son village. Mais le problème n’est pas là, les infirmières de nuit lui demandent de payer immédiatement le traitement du petit. Pas de panique, la jeune femme n’a plus l’argent sur elle, les deux infirmières proposent de payer pour elle. Pas de chance non plus, elles n’ont qu’une dizaine de yuans sur elle. Le directeur de l’hôpital mettra alors la main à sa poche.
Les médias débarquent, l’histoire de la jeune femme est alors suivie de très près. Premièrement pour retrouver le taximan qui a sûrement dû garder son argent à bord de son taxi, deuxièmement parce qu’une telle histoire de malchance est digne d’un bon feuilleton à suspense, tout le monde étant rallié à la cause de cette femme paniquée car à présent criblée de dettes, veuve de son mari décédé il y a peu, avec un enfant régulièrement malade à sa charge. Malheureusement, le taximan est incapable de remettre la main sur le sac contenant l’argent. Il mène alors sa propre enquête auprès des derniers clients qu’il prit à bord de son taxi le soir même. Conscient des problèmes qu’il fait face, une autre solution s’offre à lui : celle de briser sa tirelire et faire en sorte à ce que les dix-mille yuans soient remis à la jeune femme dont il a pitié, ce qui aura don de provoquer encore d’autres problèmes. L’homme au grand cœur qu’il était jusque là se transformera en un homme au cœur d’or, héro pour l’un (la jeune femme, les médecins, les villageois, la population, tout le monde donc) ou honte pour d’autres (sa mère).
Pur film de fiction donc, que cette accumulation record de bons sentiments à la minute. Pas étonnant lorsque les ressors scénaristiques dignes d’un drama pour jeunes adolescents, le cinéaste pensant qu’ils sont encore persuadés que la réalité du pays est tout autre, font tout pour brosser les personnages malchanceux et les spectateurs –locaux- dans le sens du poil. Invendable et sans aucun intérêt pour le public occidental à première vue, le film recèle néanmoins de petites qualités bien insuffisantes pour mériter la simple curiosité : une réalisation sans intérêt mais le montage bien rythmé fait passer les quelques 80 minutes de film sans soucis, ces sourires également ne peuvent que donner du charme à l’ouvrage. L’excellente idée de départ peut tolérer ces élans de joie et de bonne humeur –malgré ce que l’ont sait- mais ne font pas oublier son absence de substance, l’utilisation désastreuse de la musique qui y est faite et sa conclusion pas drôle et incroyablement bâclée. Ce film frais mais formaté pour le public local n’a donc strictement aucun intérêt par chez nous, on se demande même quelles sont les raisons qui ont poussées le Festival du cinéma chinois de Paris à le sélectionner.
Aussi soapy que sonne l'intrigue, aussi soapy en est l'exécution. Visiblement tourné en DV, le film ressemble à s'y méprendre à un épisode des "Feux de l'amour" avec le jeu cabotin des acteurs et des violons envoyés pour toute scène émouvante.