| Ghost Dog | 3.25 | J’irai dormir à l’hôtel |
| Xavier Chanoine | 3  |
Aventure pesante mais marquante |
Une idée simple et un peu culottée suffit parfois à lancer un concept télévisé réussi. Dans le cas présent, un frenchie s’amuse à parcourir le monde tout seul avec 3 caméras (2 fixés à sa ceinture, 1 mobile) en ayant pour objectif de manger et de dormir à l’œil chez un quidam pris au hasard dans la rue. Cela surprend un peu au départ (c’est quoi ce type ? Il est gonflé !), mais on s’y fait rapidement et cela se transforme bientôt en jeu à suspense (Dormira ? Dormira pas ?) auquel on devient accroc au bout de 2 ou 3 épisodes. D’autant que le routard Antoine de Maximy a une bonne bouille, joue efficacement les grands naïfs paumés et curieux, possède un sens de l’humour certain et préfère toujours mettre en valeur ses interlocuteurs plutôt que lui-même. Un type bien en somme, courageux mais pas téméraire, ne craignant pas d’aller au contact tout en fuyant les situations délicates (cf. les mémorables prises de bec au Vanuatu ou en Bolivie), et qui, en tant qu’ambassadeur de la France à l’étranger, renvoie finalement une image sympathique et ouverte d’esprit.
Dur dur d’entreprendre une relation poussée avec des indiens, si l’on se fie à cette courte incursion dans ce pays-continent si gigantesque et si différent culturellement. La population a beau être accueillante naturellement, les échanges tournent court entre de Maximy et les gens qu’ils croisent, même si certains acceptent qu’il les accompagne quelques instants dans leurs déambulations (le médecin qui se demande si c’est du lard ou du cochon, le drôle de type à Mumbai qui lui offre 3 heures d’embouteillage avant de lui demander s’il peut dormir dans sa chambre d’hôtel). On retiendra les fascinantes images d’un Bénarès plongé dans les brumes matinales, la course folle en rickshaw dans des rues bondées, ainsi que la famille qui lui offre finalement l’hospitalité avec grande gentillesse : des chrétiens militants anti-castes…
Comme d'habitude avec Antoine de Maximy, cette excursion de quelques jours en Inde est un véritable dépaysement. L'aventurier nous emmène voyager d'est en ouest dans un festival de couleurs et de rencontres picaresques, où le moindre recoin recèle de surprises. Ici, l'aventure est l'une des plus déroutantes et délicates à gérer, la population n'acceptant pas des masses l'intrusion d'étranger dans leurs appartements (comme le refus catégorique d'un étranger à dormir dans un Temple) malgré la bonne humeur dégagée par ces derniers. Un petit bout de chemin avec un médecin qui ne propose que des ordonnances tout en se fichant du futur du patient (seul Dieu a son mot à dire), une rencontre absolument incroyable entre de Maximy et un travailleur qui change de discours toutes les dix minutes, offrant alors au reportage une dimension pleine d'inquiétude et de suspense (l'aventurier croit même à l'entourloupe glauque) pour enfin déboucher à un final plus ouvert, aéré et aérien à bord d'un véhicule atypique (sorte de course folle dans les rues bondées de Thiruvananthapuram) en totale inadéquation avec ce qu'il a vécu la veille, coincé dans les embouteillages avec un homme impossible à cibler. Et ce dont on se doutait va se confirmer, les personnes les plus pauvres sont les premières à accueillir Antoine de Maximy à bras ouvert malgré la vraie barrière de la langue : si les habitants rencontrés jusque là parlent bien anglais, les peuples plus reculés n'ont logiquement pas les mêmes capacités. Au documentaire alors de trouver un véritable second souffle plein d'humanisme, touchant dans sa mise en scène (de Maximy filmant le visage des gens qui posent pour lui) et rendu toujours aussi drôle et captivant par les commentaires de son auteur. Une aventure menée tambour battant, bordelique à souhait mais démontrant que l'Inde a encore bien des secrets à dévoiler.
