Fils de…
"Legend of Sudsakorn" est une nouvelle tentative totalement vaine à vouloir tenter de capter et de traduire en images l'incroyable œuvre fleuve (30.000 vers) "Phra Aphaimani" du poète du poète Sunthorn Pu (1786-1855) – ou du moins une infime part; car Sudsakorn n'est en fait qu'un personnage secondaire, le fils issu de l'amour interdit entre le prince Apai Mani et une sirène (à ce titre voir la fiche dédiée au film " PHRA APAI MANI" de 2002), apparaissant que bien tard dans la magistrale œuvre intégrale.
Ce personnage particulier avait déjà donné lieu à une première adaptation, en 1976, au moins aussi épique que l'écriture de l'ouvrage initial, puisqu'il s'agissait de la réalisation du tout premier long d'animation thaï conçu dans des conditions extrêmement précaires et toujours considéré à juste titre de nos jours comme mètre étalon de l'Histoire du Cinéma Thaï.
Bref, quelques rapides anecdotes pour tenter de restituer ce film dans son véritable contexte (comme aucune critique n'avait su en faire mention lors de la trop discrète sortie française du DVD au mois de mars 2008) et pouvoir d'autant mieux l'attaquer.
Car si cette nouvelle adaptation était attendue comme le loup blanc dans son pays d'origine, autant son rejet avait été passionné à sa sortie. La faute à un manque de moyens évidents et – bien évidemment – l'absolue impossibilité de pouvoir traduire les magnifiques vers en quelques minutes sur le grand écran, à moins d'avoir un artiste du talent de Peter Jackson à la réalisation et de disposer de fonds en conséquence. L'histoire est donc terriblement bâclée, les CGI risibles, décors et costumes pas du tout à la hauteur des superlatifs nécessaires à une telle entreprise. La surabondance de fonds verts entraîne une véritable explosion de couleurs plus pétaradantes les unes que les autres, entre tendances kitsch et new-wave (des couchers de soleil rose bonbon et des cascades bleu Canard-WC) et gothique du pauvre (quelques grottes en carton pâte mal éclairées). Les incrustations sont incroyablement visibles (chevauchement du dragon; personnages marchant sur l'eau sans même faire de vagues) et la plupart des animations à peine dignes d'un vieux trucage créé par Amstrad. Le film est une production MONO, studio de production plus connu pour ses séries B ("Vengeance"), que pour des blockbusters à la Sahamongkol (société gérant 80 % des sorties thaïes, dont des succès internationaux, tels que "Ong Bak" ou autres "Chocolate").
Le film étant entièrement façonné à un jeune public, toute l'intrigue a été simplifiée à l'extrême sans tenir aucunement compte de toute la portée mythologique complexe et toute attention est entièrement portée sur sa jeune vedette, TRIRAT Charlee (auréolé de son mega-succès de "My Girl" et – à échelle plus internationale, "Le pensionnat").
Mais voilà, tout ça, on s'en fout. Que la Thaïlande ne dispose pas des mêmes moyens que la Toute-Puissante Hollywood, on a finit par bien le comprendre sur toutes ces années; ce qui n'aura pas empêché ce pays de s'imposer autant commercialement ("Ong Bak" pour n'en nommer qu'un), que artistiquement (Apichatpong, Ratanaruang pour n'en citer que deux). Et à me rappeler mes propres expériences cinématographiques, quand je mouillais encore le maillot, rien qu'en voyant baisser les lumières, solidement calé sur trois poufs pour pouvoir apercevoir l'écran par-delà des spectateurs adultes assis devant moi, jamais je n'oublierai ce moment magique à voler à dos du dragon de "L'Histoire sans fin". Est-ce que je m'étais soucié des ficelles pourtant déjà clairement visibles à l'époque ? Non. Est-ce que les effets fauchés avaient-ils empêché à ce que je rêve ? Trois fois non. Et rien qu'en me rappelant ce seul épisode de pur bonheur (parmi tant d'autres), je puise du pur plaisir coupable, pour accompagner Sudsakorn dans sa folle odyssée, à affronter monts et vallées, vils et méchants et de franchement flipper devant ces vilains hommes-papillons, qui créent, l'espace de quelques instants, un pur délire visuel dignes des meilleurs Burton. Voilà. Il n'y a pas d'intrigue cahotante, ni de fin un peu abrupte et décevante (dont un showdown samouraï-esque franchement ridicule) qui tiennent, je prends un certain pied à prendre cette légère pastille colorée en pleine face (surtout sur grand écran à l'époque de sa sortie thaïlandaise) et je m'évade beaucoup plus loin, que grâce à cette pléthore de productions américaines récentes à vouloir surfer sur le succès du "Seigneur des Anneaux"; car le bestiaire est beaucoup plus original et les lieux bien plus exotiques que dans "Le Monde de Narnia" (à tout hasard).
Et j'ai déjà hâte de montrer le film à mon propre gamin pour tenter de déchaîner la même passion, que moi, j'ai pu connaître au contact du cinéma à l'époque. (bon, après "Sudsakorn", je passerai quand même à une vitesse supérieure avec des vrais classiques; c'est pas un chef-d'œuvre, non plus, hein !!).
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