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Modus Anomali

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les avis de Cinemasie

2 critiques: 2/5

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1 critiques: 2.75/5



Arno Ching-wan 2.5 Twistus Regularis
Ordell Robbie 1.5 Trop de réchauffé formel et narratif pour un film trop vain.
classer par notes | date | rédacteur    longueurs: toutes longueurs moyen et long seulement long seulement


Twistus Regularis

(Issu du CR Gérardmer 2013) Plonger dans l’inconnu, dans un cinéma indonésien que je ne connais encore que très peu, à travers un jeune réalisateur qui, de l’avis de certains, monte en flèche. Joko Anwar. Il surfe sur une bien belle vague, dans le sillon de celle, remarquée, du The Raid de Gareth Evans. Qui fait encore méchamment parler de lui avec son segment de S-VHS, paraît-il démentiel ! Soit dit en passant. Commencer Modus Anomali, c’est d’abord plonger dans une jolie forêt à la fois verdoyante et sombre, tout aussi inquiétante qu’attirante. Si l’on ne sait pas ce qui se cache, là-bas, derrière cet arbre – brrr ! -, on éprouve paradoxalement l’envie de s’y promener, d’aller chercher des trucs, des champignons, la jolie clairière cachée au détour d’un chemin improvisé. L’a priori que j’avais du film ? Négatif, je ne m’en cacherais pas. La bande-annonce ne m’avait pas emballé et le début du métrage, même plaisant ne changea pas la donne. « Encore » un survival dans les bois, « encore » un twist à venir, que l’on devine rocambolesque, « encore » du trash provoc’ avec une femme enceinte crevée à coups de couteaux. Encore, encore, encore, avec en plus un point de détail qui m’a singulièrement gêné : le tout est joué en anglais. Horreur ! Où est le dépaysement, la découverte d’une culture quand un réalisateur veut à se point se vendre à l’international qu’il efface autant que faire se peut ses origines ? « Vivement la version française » me suis-je même avoué, gêné par les nombreux « fuck » entendus ça et là. Passé le constat évident que ce projet sent la carte de visite et la roublardise à plein nez, une sorte de provocation mainstream comme une rébellion affichée ne serait en fin de compte qu’un fond de commerce – rien de nouveau sous le soleil - je me suis surpris à trouver, en grattant ce vernis, une œuvre – mineure - et un auteur. Ces scories difficilement assimilées, on suit avec un plaisir sadique, distancé et non sans humour, les aventures de cet homme qui a perdu la mémoire, ne sait pas qui il est, se rend compte que sa famille s’est faite massacrée et qu’il est pourchassé par un fou dont il ne sait rien. S’il souhaite sortir de ce cauchemar, nous, on ne l’accompagne pas. Le plaisir est bien là mais ludique, uniquement. Des réveils placés un peu partout dans la forêt, des indices qui ne sont là que pour lui nous placent assez vite sur une piste classique : celle du twist à venir, qui va changer la donne. On sait dès lors, habitués que nous sommes à ce nouveau sous-genre qu’est le film à twist, que tout peut arriver. Remember le norvégien Babycall, grand vainqueur à Gérardmer l’an dernier, très sympathique « cliché » du genre « je vais te surprendre ! » mais en fait pas du tout. On ne cherche même plus à deviner le pot au rose : on s’en cogne. On a vu tout et son contraire. Peut-être est-ce un rêve ? Ou l’antichambre de la mort ? Ou alors ce mec là est-il un fantôme ? Ou alors… sans me vanter – je ne fus pas le seul - , je devinai assez tôt une partie de « l’arnaque » mais à la décharge de Joko Anwar, dans le détail elle s’avéra beaucoup plus perverse que ce à quoi j’avais pensé de prime abord. Et de me dire en bout de course que pour inventer une histoire pareille, avec une distanciation pareille et un tel humour noir, il faut être un brin psychopathe dans l’âme. A vouloir toujours surprendre son monde et faire le malin, on en oublie de raconter une histoire qui serait autre chose qu’un délire jetable.

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                                         Je ne suis peut-être pas une lumière, encore moins une flèche, mais je suis équipé !

Anwar  parvient épisodiquement à faire tenir l’ensemble avec quelques meurtres gratinés et, surtout, lors du basculement, nous gratifie d’un final excellemment bien construit, planant, complètement « autre », qui nous emmène aux côtés d’un bad guy dans sa voiture, longtemps, très longtemps, avant qu’il ne poursuive son office sanglant. La scène fait figure de transition narrative et sensorielle sans user d’une autre transition que la longueur de ce seul et même plan. On traverse le miroir dans le sens du retour sans en voir un seul, de miroir. Le temps de ces quelques instants l’on pense autant à Weerasethakul qu’à Fincher, et les derniers plans du films n’effaceront pas cette impression. Le talent déployé sur la mise en scène, la photo et le son atténuent le manque de budget évident (les scènes de vomi sont craignos, quelques meurtres ont des effets très proches du Z) mais la beauté des plans joue peut-être, aussi, en la défaveur de l’immersion. Car on est loin du craspec en 16mm à la Maniac ou Massacre à la tronçonneuse. C’est beau, la HD. C’est sympa sur la chaîne National Geographic mais sur des films d’horreur, franchement ? Plus généralement, avec l'avènement de la belle image en haute définition me manque de plus en plus cette brume à la Youri Norstein, ici ou ailleurs. J’ai revu The Hobbit il y a peu. J’adore toujours mais cela manque un peu de cette brume, c’est évident. Tout montrer étouffe l’imaginaire. Bref. Reste que Joko Anwar s’en sort très correctement sur ce projet multifonction. Il a un sens du cadre évident, insolent. L’expérience n’est pas désagréable, c’est globalement bien fichu mais j’aimerais davantage de sincérité, d’empathie, de respect pour les personnages, ici tous méprisés. Derrière ce cynisme qui, ne lui en déplaise, côtoie malheureusement le tout venant de la production horrifique actuel, on perçoit parfois un discours plus émouvant, que le sieur n’ose pas – encore ? –exprimer. « Encore », cette fois, parce que je ne connais pas la filmographie de ce réalisateur, largement encensée ailleurs. A suivre, donc. Parce qu’il va de l’avant, le bonhomme ! Comme un Takashi Miike ?…

02 mars 2013
par Arno Ching-wan


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