Ordell Robbie | 2.5 | Le désir de cinéma ne suffit pas toujours... |
Elise | 3.25 | Dur de donner un avis bien cadré sans connaître le fond de ce film |
Yann K | 3.75 | Beau film "pauvre" |
En effet, ce film a tout l'air d'un film d'étudiants au budget presque inexistant, qui fait ce qu'il peut avec les moyens du bord. Il faut avouer que la conception du film en général n'a vraiment pas l'air de bénéficier de moyens mirobolant et qu'en admettant que les acteurs et l'équipe du film soit bénévoles, le film doit tourner autour d'un budget vraiment très restreint. Dans cette optique, on ne peut que féliciter l'équipe d'avoir tout fait pour concevoir ce film dans ces conditions ; toutes les scènes sont simples, rarement composées de plus de deux plans, et l'image en noir et blanc dénote d'une part, du besoin d'économie au niveau de la caméra, et d'autre part d'un moyen de facilité pour éviter un travail fastidieux sur les couleurs. Certains plans sont également tournés avec une autres caméra (sans doute celle que l'on voit dans le film) afin de montrer les images tournées par le personnage principal, ce qui donne une originalité supplémentaire au film, et même si ce genre de procédé est souvent utilisé dans d'autres films, ca a plus de charme dans un film très limité dans ses moyens techniques.
Du point de vue scénaristique, ca ne casse pas des briques ; cela dit, tout revient encore aux moyens techniques ; difficile de filmer quelque chose de très élaboré sans un budget assez conséquent. Donc au final, on se retrouve avec une tranche de vie, pas réellement originale, mais plutôt bien racontée. Et même si la vie des deux jeunes portant le film n'apparaít pas rose, on ne peut pas dire, vu le final, que le film porte un message défaitiste, comme la plupart des histoires racontant la jeunesse désoeuvrée en Corée. On peut même dire que le message final porte un message assez optimiste et confiant sur la nature humaine, avec le prêteur qui ne veut pas endetter la jeune fille encore plus qu'elle l'est et le trafiquant qui ne la trahit pas malgré son attitude au départ plus que suspecte.
Les acteurs sont plutôt cohérent, même si on aurait aimé voir quelques sourires sur leur visage (ce qui aurait hors propos en outre), et sont même bons pour des acteurs quasi-amateur. Enfin, même si le film porte un message plutôt positif, je dois avouer que dans la catégorie film expérimentaux ou à petit budget, je préfère tout de même un Die Bad ou encore un Tears.
My Generation est un film de pauvre sur la pauvreté. Les jeunes du film sont des gueux ordinaires, nos amis qui galèrent, chacun de nous peut être, autrefois ou un jour. En France on donne plein de noms à ces gens (les précaires, les RMIstes, les recalculés...), en Corée du Sud on ne les voit que trop rarement, donc on est heureux qu’ils soient la seule et bien fragile matière d’un premier long métrage presque auto-produit. Le meilleur de My Generation sont de fascinantes et désespérantes descriptions d’une circulation d’argent, des gestes, du concret, des faits, du réel, les combines minables que tentent un couple pour avoir, perdre, regagner 3 millions de wons. C’est le prix d’une caméra PD 150 là bas, c’est la somme symbolique du film, cela aurait fait d’ailleurs un titre plus conforme à son vrai sujet. Cela aurait du être encore plus le cœur de My Generation, qui excelle dans la sécheresse, le laconisme, et se relâche un peu dès qu’il tente d’insuffler du sentiment.
La réalisation montre nombre de signes prometteurs mais ne tient pas encore fermement le film. Certains cadres sont un peu mous, des plans trop facilement étirées. Il est discutable que l’image semble avoir été rendue encore plus crade que ce qu’elle n’est déjà, de la DV noir et blanc. Cette surcharge dans la pauvreté n’était pas indispensable, elle enlève de la dignité au film, alors que les acteurs amateurs (ce sont les mêmes que l’équipe technique) font des efforts pour lui donner de la grandeur. Reste qu’on préfère mille fois les maladresses de cette dèche aux défauts de l’opulence. My Generation ne se permet qu’un seul effet de style. De rares passages à la couleur (et peut être à la pellicule 16 mm, c’est à vérifier), un artifice souvent casse-gueule, font passer simplement le seul message d’espoir du film : le monde de My Generation est plus beau lorsqu’il est filmé à travers une caméra (en couleur) que dans la réalité (en noir et blanc).
Mais l’espoir est vite tué. La dernière demi-heure est un superbe tunnel de noirceur, dans la grande tradition de l’asiatique indé qui fait couver un hurlement sans le faire exploser. C’est au spectateur de gueuler, le film sert à le faire réfléchir et non pas à lui dire quel slogan adopter. On est désolé de devoir vous raconter cette fin, car c’est le principal intérêt du film, sa dernière image était la plus belle de l’ensemble de la sélection coréenne au festival de Pusan. Le jeune homme a vendu sa caméra adorée en faisant un rabais, mais a obtenu de la garder encore un soir. Sa copine a fini par retrouver illégallement 3 millions de wons mais amputés d'une commission à un intermédiaire véreux. Elle a moins d'argent qu'au début. En revenant dans leur appart' miteux, elle ne dit rien. Il sort la caméra dont il va se séparer le lendemain. Il filme sa copine. On s’en était à peine aperçu avant, en fait elle est belle en couleurs. Mais elle est dans cet appart en noir en blanc. Elle commence à pleurer. Cut immédiat. Fin. My Generation n’est pas une comédie romantique.