Armée de l'ombre
Avec sa durée assez élevée pour un film coréen et son scénario signé de l'enfant terrible du cinéma coréen JANG Seon-Wu qui prend le temps de développer tous ses personnages en évitant un regard simpliste sur le conflit, Les Partisans du Sud se donne les moyens d'être une fresque digne de ce nom sur la Guerre de Corée vue du point de vue des combattants pro-communistes.
Outre ce dernier parti pris, la bonne idée du scénario est de montrer l'"armée populaire" communiste du film vue au travers du regard du "corps étranger" qu'est Lee Tae: une figure politiquement neutre qui finit par s'intégrer progressivement à cet univers-là. Incarné par un Ahn Sung Ki égal à lui-même, ce personnage ne perd jamais vraiment son regard distant sur les choses. C'est ainsi plutôt par espoir de retrouver une soldate dont il est épris et dont il a été séparé par les lois militaires puis par désir de survie qu'il poursuit avec l'armée populaire une marche historiquement vouée à l'échec. Et non par réelle adhésion idélologique. Reste que l'armée pro-communiste est dépeinte tout sauf caricaturalement. Parmi les leaders idéologiques de l'armée, chacun a une vision différente du rêve communiste tandis que certains soldats n'hésitent pas à affirmer leur doute vis à vis de la cause défendue ou de l'intéret de poursuivre le combat. Sans parler d’un personnage exprimant le malaise d’une nation qu’il sent condamnée depuis son impuissance à résisister à l’envahisseur nippon et parce que la Guerre de Corée fait d’une nation le jouet de la lutte USA/URSS dans la Guerre Froide.
Et l'horreur de la guerre n'exclut pas non plus des instants de repos tels que la scène des baignades collectives nues. Le reste du temps, on retrouve des thématiques classiques du film de guerre. La lutte entre désir individuel et obéissance à l’armée, les conséquences violentes de la discipline militaire sont ainsi évoquées. De même que les conséquences de la guerre sur les civils et le coût humain de la guerre. On y lutte également pour survivre au milieu d’une nature inhospitalière (hiver rigoureux, relief montagnard). Et on exploite dans ce cas la nature pour survivre. On en est ainsi parfois réduit à puiser à boire dans des branches où à manger des pétales de fleurs. Formellement, la mise en scène de Jeong Ji-Young oscille entre filmage pas révolutionnaire mais efficace lors des batailles et lenteur classique le reste du temps. Sans être transcendante, elle n’est ni planplan ni académique. Quant au score, il est raté d’un bout à l’autre du film. Ses tendances dramatiques épisodiques font d’ailleurs tache au vu du parti pris de refus de l’emphase de la mise en scène et de la direction d’acteurs.
Néanmoins, les Partisans du Sud finit par s’ajouter aux relectures intéréssantes des traumatismes de l’histoire récente de la Corée du Sud par son cinéma.
Grande épopée sur fond de guerre de Corée
Ce film, basé sur les mémoire de Lee Tae, raconte son entrée dans la guérilla sud-coréenne en temps qu'officier de communication pour ensuite rejoindre une unité de terrain. Basé sur la ligne de front, la guérilla a pour but d'affaiblir les lignes ennemies par des attaques brèves et altérant leur moral (comme toute guérilla en outre). Dans le cas présent, l'action commence quand les américains ont débarqué en Corée, c'est-à-dire à partir du moment où l'armée nord-coréenne se met à reculer, puis montre les actions de la guérilla pendant la guerre de position qui s'effectua de 1951 à 1953, année où l'armistice fut signée entre les deux camps. Le film a l'avantage de n'être vraiment pas politisé mais humaniste ; aucun jugement de valeur n'est porté sur les doctrines des différents partis par la narration, on ne voit que les différentes remarques des soldats par rapport à leurs propres convictions, qui ne semble pas exagérées au vu des événements qui se déroulent. D'ailleurs on remarque que les dialogues sont assez épurés ; pas de paroles superflues, ni moralisatrices, mais simplement des tranches des survie au milieu d'un groupe perdu en montagne sans contact avec leurs alliés.
L'interprétation est excellente ; chaque personnage n'en fait jamais trop, restant complètement crédible tout du long. Particulièrement Ahn Sung-Ki, présent à l'écran du début à la fin, représentant magnifiquement les changements de psychologie, la maladie et la fatigue. Au final, même si le film est un peu long, il est très bien mis en forme et éclaire les spectateurs sur une zone obscure de la guerre de Corée.
27 juillet 2005
par
Elise