Une satire à la main trop lourde
Critique avec SPOILERS
Si Yimou a fait depuis bien pire cinématographiquement que ce Qiu Ju, le film n'en est pas pour autant une éclatante réussite. Si les travers roublards du cinéaste n'en sont pas absents, le film permet de comprendre pourquoi les jeunes cinéastes chinois actuels affirment que même s'ils n'apprécient plus ses films Yimou leur a ouvert la voie.
Point ici de cinéma en costumes poseur et/ou pompier mais une oeuvre pleinement ancrée dans le quotidien d'une Chine rurale, son administration et son système judiciaire tout sauf juste. En ce sens, on peut trouver des éléments annonçant ce qui sera développé par la jeune et talentueuse garde actuelle du cinéma chinois. Pas de photographie léchée tape à l'oeil, pas non plus de calcul pour apitoyer le spectateur sur le sort de Qiu Ju alors que le sujet récèle un fort potentiel de mauvais mélodrame, juste un tableau réaliste de la Chine de son temps. Mais malgré tout le film peine à convaincre non à cause d'une mise en scène pas renversante mais pas non plus catastrophique (oscillant entre platitude et travail sur la distance perdant de son impact parce que trop visible; on pourrait aussi ajouter un score mal placé à certains moments du film) ni à cause d'une Gong Li qui s'en tire bien dans le rôle titre mais parce que Yimou est aussi lourd dans la satire qu'il le sera dans son wu xia pian pompier. Les satires ne font que rarement dans la dentelle mais en général elles compensent par l'humour, humour absent ici d'où l'impression d'assister à une suite de scènes aussi démonstratives qu'un tract. On a l'impression que les personnages sont les pantins de la démonstration de Yimou sur un monde rural en retard économiquement par rapport au boom urbain et sur la bureaucratie chinoise et la justice aussi injustes à la ville qu'à la campagne, sur le différences de mentalités urbain/rural.
Au rayon du trop démonstratif, du choix de stylisation visible sans tension autour de laquelle se construire, on a le fait de filmer Qiu Ju de façon distante pendant tout le film pour cadrer de près à la fin son visage plein de regrets. Point montrant le cinéaste revenir à ses penchants roublards jusque là mis en veilleuse: après avoir été critique vis à vis du régime pendant tout le film, le cinéaste montre la rebelle regretter ses actes comme s'il ne voulait pas froisser les autorités. Comme s'il y avait une volonté de donner des gages à la fois au public festivalier occidental et au régime. On n'est pas si loin de la façon dont Fincher joue de façon opportuniste la carte de la rébellion dans Fight Club avant de la jouer moralisateur sur la fin. Dans Vivre ! et même dans l'insupportable Pas un de moins Yimou sera heureusement moins ambigü dans son propos. Mais les passages qui supportent le moins la vision après la découverte d'un Jia Zhang Ke ou d'un Wang Bing sont les passages urbains, la réalité de l'agitation des villes, de leur quotidien ayant été depuis retranscrites avec bien plus de fraîcheur, d'énergie et d'audace par la jeune garde chinoise et plus seulement avec de la caméra à l'épaule à dose homéopathique pour faire documentaire comme ici.
Au final, le film faisait souffler un vent neuf sur le cinéma chinois en son temps mais il semble aujourd'hui dépassé et a un intérêt plus en tant que cours d'histoire que comme oeuvre cinématographique.
Portrait émouvant d'une femme, d'une paysanne (et aussi d'une sacrée emmerdeuse...) face au système chinois.
Relativisons les choses, Qiu Ju est une sacré emmerdeuse aux yeux de l'administration urbaine de son pays, et à nos yeux également. Mais je ne suis pas sûr qu'elle s'en rende vraiment compte: elle avance dans sa logique de paysanne simple, qui réclame justice pour un problème important à ses yeux. Elle exige juste que le chef du village qui a failli castrer son mari dans une rixe leur fasse des excuses sincères. Mais comme le chef ne s'exécute pas à sa demande et que son mari lui demande de laisser tomber, elle va continuer le combat toute seule, par principe ! Et tant pis pour le fait qu'elle soit enceinte, que les procès lui reviennent cher et qu'elle ne soit jamais allée en ville, elle ira jusqu'au bout...
On se croirait un peu chez Kafka dans ce film, ou la description d'une femme seule face à la machine judiciaire chinoise. On commence tout d'abord par les autorités indépendantes du village: ces dernières condamnent le chef à une simple amende. Mais quand il balance les billets à la figure de Qiu Ju, évidemment, elle ne va pas se baisser pour les ramasser et va se rendre au district pour porter plainte: à nouveau le chef est condamné à la même amende. Qu'à cela ne tienne, Qiu Ju se rend en ville pour en référer à de plus hautes autorités. Et même si elle s'entend dire que son histoire n'intéresse personne en ville, elle ne se décourage pas, insiste lourdement et au bout du compte obtient un nouveau verdict... 15 jours de tôle pour le chef !!
La dernière image de Qiu Ju, en plan serré alors qu'elle était cadrée de loin durant tout le film, est assez ambigue. On la voit regarder le fourgon emmenant le chef vers la prison, consternée; apparemment elle n'est toujours pas satisfaite du jugement, se rendant peut-être compte qu'elle est allée trop loin. Mais qu'a bien voulu dire Zhang Yimou dans ce film, qui va jusqu'aux limites de l'absurde pour analyser en profondeur le fonctionnement de la justice ? Que cette dernière est trop compliquée ? Pas assez à l'écoute de ses citoyens ? Qu'elle manque de moyens ? Qu'elle est soit trop complaisante envers les accusés, soit trop sévère, bref qu'il manque un juste milieu ? Pour moi, Yimou montre surtout un décalage frappant entre une Chine en plein essor industriel et économique, et le reste de la population, rural, pauvre et possédant un faible niveau d'éducation, qui est en dehors de ces progrès et qui se retrouve complètement déconnecté, à mille lieues du mode de raisonnement des chinois des villes (on retrouvera ça dans Pas un de moins).
Rappelons que ce film a obtenu le Lion d'Or à Venise et le Prix d'Interprétation Féminine pour Gong Li, dans un rôle complètement opposé à celui d'Epouses et Concubines. C'est un très beau film, pas du tout difficile à suivre, et qui propose un regard amer sur la Chine d'aujourd'hui, chose assez rare pour être signalée. A voir sans hésiter donc.
QIU JU n'est pas le meilleur film de ZHANG Yimou, ni mon préféré, mais ceux qui auraient apprécié PAS UN DE MOINS ou THE ROAD HOME retrouveront une ambiance à peu près identique, c'est à dire un film rural, avec l'idée de la confrontation ville/campagne.
le personnage de Gong Li peut énerver par son obstination de vouloir sauver la face, et le problème du film se situe là: le point de départ étant un fait divers sans réelle gravité, le film manque un peu d'enjeu mais ZHANG Yimou s'en sort pas trop mal pour tenir la distance. quelques passages font sourire, d'autres arrivent à être touchant mais globalement on peut dire que le film est un des moins réussi du réalisateur.
QIU ju se laisse regarder sans trop de mal, l'histoire n'étant pas trop prenante mais le côté limite documentaire des relations sociales ainsi que la description du système judiciaire et policier en font un film tout de même intéressant.
Une fresque villageoise & féminine intéressante + émouvante
Comme dit la Rédac : "Lion d'Or à Venise et Prix d'Interprétation Féminine pour Gong Li. C'est un très beau film, "
Un peu difficle à suivre si on aime l'action (c pas Rush Hour !), avec un regard très aïguisé & un peu amer sur la Chine paysanne des années 1990 --> chose quand même très rare.
A voir.
interessant
j'ai vu ce film sans trop m'attendre a quoi que ce soit et je dois dire que j'ai ete etonnee.
je trouve que ce film depeint bien la societe chinoise de cette epoque.