Brutale évocation des rues de Bombay
Pour son premier long métrage de fiction, la jeune trentenaire Mira Nair choisit en 1988 d’abaisser sa caméra à hauteur d’enfants, les enfants de la rue en guenilles en plein Bombay, et sonne une charge virulente contre l’irresponsabilité d’adultes qui volent de précieuses années d’innocence à ces gamins dont l’instinct de survie est déjà mis à rude épreuve ; ainsi, Krishna, abandonné par ses parents forains, erre dans la mégalopole à la recherche d’un petit revenu qui lui permettrait de manger et fait de mauvaises rencontres ; ainsi, Manju est délaissée par un père violent et maquereau (le toujours terrifiant Nana Patekar, le genre de type bonimenteur et imprévisible dont on préfère éviter de croiser le chemin) et par une mère prostituée. Les deux gosses se rencontreront dans les rues sales et surpeuplées de la ville et subiront des destins différents.
La caméra est vive, le rythme soutenu, le portrait brutal, pourtant c’est toujours une envie de vivre et de s’en sortir sans pareil qui sous-tend Salaam Bombay, c’est toujours la lueur d’espoir qui fait surface et guide dans l’obscurité. Lorsque Krishna est par exemple arrêté et placé en foyer de redressement, il constate que les adultes de ce centre ne valent pas mieux qu’à l’extérieur et laissent la loi du plus fort s’instaurer entre les pensionnaires ; il tente alors de s’en échapper, grimpant une échelle et des murs barbelés, persuadé que sa chance est à l’extérieur, parmi la circulation, les petits business et les dangers. Quant à Manju, elle s’enferme dans le mutisme pour se couper du monde dangereux des adultes…
Dans la lignée de Pixote, San Mao, La cité de Dieu ou La petite marchande de roses, Salaam Bombay est un hymne vibrant aux droits de l’enfance et un appel à la responsabilité des parents, justement sanctionné de la Caméra d’Or à Cannes.
Excellent
Un film magnifique, extrêmement humain que j'aimerai beaucoup revoir. J'avais eu la chance de la voir au ciné lors sa sortie à la fin des années 80 grace à une prof pas conventionnelle, qui n'était pas Miss Keating mais m'aura tout de même fait découvrir de jolies choses (pas d'esprit mal placé svp). Les souvenirs du film sont un peu flous près de 20 après, mais les émotions ressenties encore perceptibles. Pas de folie Bollywoodienne dans ce film, juste l'histoire d'un gamin racontée avec beaucoup de justesse et une façon de nous faire voyager dans Bombay comme le regard que Wong Kar Wai nous offre sur Hong Kong.