Samourai hors la loi
Que manque-t-il à Sword of the beast? De ne pas être un premier film. Ce premier film, c'était Trois Samouraïs hors la loi, coup d'éclat inaugural qui participa au renouveau sixties du chambara. Si ce second film confirme la singularité du projet de cinéma de Gosha, reste qu'il ressemble à un prolongement thématique moins inspiré de ce premier essai. Les grands thèmes de Gosha sont encore là: figures de samouraïs désœuvrés à l'opposé de l'héroïsme classique, scepticisme vis à vis de l'autorité, samouraï solitaire en révolte contre son propre clan, rebelles assumant pleinement le statut bestial que leur attribue la société de leur temps, vision noirissime de la condition de samouraï… Bref rien que son premier film n’ait pas déjà traité. Pas de théâtralité dans la direction d’acteurs, une forme le plus souvent d’une grande sobriété et d’une grande économie de moyens et un refus fréquent de la dramaturgie classique. Toutes choses confirmant Gosha comme figure du renouveau du chambara sixties. Au milieu de cette sobriété surgissent néanmoins quelques travellings stylisés et un usage judicieux du plan subjectif. Sauf que des personnages pas autant fouillés que dans le film précédent et une thématique moins bien creusée donnent au film l’allure d’une coda inutile, d’une répétition en moins bien. Le parti pris de forte multiplication de personnages sur une durée de série B empêche Gennosuke et Jurota d’acquérir l’envergure des héros de Trois Samourais hors la loi et de Goyokin. En allant trop loin dans la sobriété formelle et le refus de la dramatisation, Gosha empêche trop souvent son film de décoller et d’égaler ses plus grandes réussites. Restent des combats bien exécutés et un superbe final d’une extrême noirceur tirant sur la fin le film vers le haut. Et le fait que Gosha s’en relèvera par la suite et confirmera que son entrée en matière tonitruante n’était pas un coup d’éclat sans lendemain.
Chambara sans surprise
C'est la seconde fois que le jeune cinéaste Gosha Hideo s'adonne aux joies de la réalisation et offre un spectacle honorable, mais loin du coup d'essai flamboyant orchestré avec Trois Samouraïs hors-la-loi. Le Sabre de la Bête démarre pourtant en trombe avec un premier plan tout aussi audacieux que les prises de risques formelles opérées dans son métrage précédent, ce gros plan sur Gennosuke qui se réveille brusquement lorsque le titre du film apparaît à l'écran, puis ces moments de silence voulus pour laisser le cast défiler à l'écran alors que l'action -importante- continue à l'écran. Gennosuke est recherché, ses assaillants ne sont pas loin et font mine de nourrir leurs chevaux tandis qu'une jeune femme attirante s'offre son corps, le tout pendant que le cast défile à l'écran. Ce soucis de débuter presque en âge est confirmé par un premier combat intéressant en moins de cinq minutes. L'action est posée, et le récit peut alors se mettre en place et faire montre aussi de longueurs du fait d'un trop plein d'informations : les rencontres avec différents samouraïs, brigands et paysans met trop de temps et casse le début tonitruant du film. Au film alors de dérouler les séquences classiques du chambara avec les jeux de pari sur les pairs et impairs, la peinture virulente de l'insoumission féminine avec une demoiselle qui ferait presque office de chef à part entière (on verra que les femmes auront plus d'importance qu'il n'y paraît dans l'oeuvre globale de Gosha Hideo, avec entre autre le somptueux et baroque Death Shadows (1986) réalisé vingt ans plus tard) puisque c'est elle qui veut avant tout la mort de Gennosuke. Les autres, à savoir les hommes, suivent les conseils de la belle tout en persévérant parallèlement dans la quête du trésor convoité. Il est aussi amusant de voir que Gosha réutilise ce qu'il entrevoyait -de belle manière- dans Trois Samouraïs hors-la-loi avec notamment la relation d'amitié entre Gennosuke, ronin, et un brigand tout ce qu'il y a de plus pauvre et hypocrite, lesquels s'uniront pour la traque du trésor : la séquence, amusante, où le brigand discute de ce qu'il fera avec l'argent renvoie aux images classiques du pauvre optimiste aux idées utopiques.
L'opposition romance/héroïsme est aussi tout particulièrement appuyée au milieu du métrage, où les scènes d'affrontements au sabre se font de plus en plus rare pour laisser place à un certain formalisme proche de l'académisme (Kurosawa et Kobayashi, à la même époque, font bien mieux) : lorsque Gennosuke se rapproche de la jeune femme qui lui confie vouloir être une bête, elle aussi, ne renvoie à rien de bien inédit dans le chambara ou autre oeuvre romanesque. Les mouvements de caméra et la composition du cadre souffrent aussi de ce petit souci. Outre le fait que Gosha démontre déjà de belles audaces formelles, dans un style très photographique (peu de personnages en plein centre de l'écran façon formalisme Ozu ou Naruse), elles ne semblent pas très appuyées et ne donnent ainsi pas un cachet qui ferait que Le Sabre de la Bête se démarque d'une quelconque production aux sabres. Pourtant le film est très beau, avec un usage parfois couillu du grand angle qui étire les visages pour les rendre inquiétants, de même que les quelques plans en vue subjective (de mémoire, deux) ou en contre-plongée donnant de la grandeur aux personnages, le cinéaste étalant ici aussi une galerie de "gueules" malgré un casting pas si attirant que ça. Le fait que le film soit grandement tourné en extérieurs, notamment dans une forêt qui semble impénétrable et paradoxalement ouverte au danger (personne ne peut rester seul(e) sous peine d'être dérangé(e) par le premier brigand venu) donne plus de plus-value au film dans la mesure où il tranche radicalement avec les films de Kobayashi, par exemple, qui se situent majoritairement dans des intérieurs étouffants et suintants et qui peuvent réduire le champ d'action et les trouvailles visuelles (ou simplement gadgets comme les nombreux plans sur les sommets de la forêt) bien que ce dernier n'ait plus rien à prouver dans le registre formel. Le Sabre de la Bête est donc un chambara classique confirmant le bon talent de Gosha Hideo dans le domaine, mais qui souffre de baisses de rythme et d'une redite -moins réussie- de son premier essai. Les amateurs apprécieront tout de même.
Sympa
Second film de Gosha, moins classe que son premier, mais ça reste du chambara haut de gamme tout de même.
On suit un ronin pourchasser pour meurtre ( alors que d'habitude les ronins sont gosha sont juste des solitaires qui errent ), interpreté par le toujours tres classe HIRA Mikijiro qui degage vraiment beaucoup de charisme a chaque scene, comme on est chez Gosha on a plein de personnages secondaires tous aussi interressant les uns que les autres, dont une femme qui prefigure les futurs roles de femme forte qu'il y aura dans ces films suivant.
Assez sobre dans sa realisation, Gosha nous livre tout de même des scenes particulierement réussi ( j'aime bien quand Gennosuke etudie sa chambre et la hauteur pour voir quelle sabre utilisé ), et bon comme toujours le climax tue.
Un bon ptit chambara, loin d'etre mineur dans la filmo de Gosha.
22 décembre 2008
par
Scalp
Chambara bestial
Je continue ma découverte du cinéma de Gosha après
3 Samouraïs Hors-la-loi avec son deuxième film. Il y retrouve sa figure, qui deviendra fétiche, du ronin pour un chambara plus étoffé mais dont l’efficacité est un peu moindre.
Mikijiro Hira incarne, toujours avec un certain charisme, Gennosuke, un ronin qui durant sa fuite va rencontrer pléthore de personnage. Et cet aspect est hautement intéressant car Gosha, en faisant intervenir ronins, samouraïs, paysans, missionnaires, chercheurs d’or et commerçants, nous dépeins a sa manière le Japon féodal et son envers. Un Japon divisé en caste, dépendante les unes des autres, mais dont la seule parole est la violence. Lutte des classes, guerre des clans, ce Japon est sombre en ces temps troublés durant lesquels la féodalité vit ses derniers instants. La scène d’intro illustre à merveille ces temps d’incertitude : Gennosuke, caché dans un champ de blé, préfère la fuite lâche à la mort honorable. Les valeurs d’Honneur et d’Orgeuil n’ont plus court ici. Une manière de pointer du doigt l’immobilisme dont a fait preuve le Japon en son temps, qui a fini par pourrir le système féodal de l’intérieur, jusqu'à le corrompre et lui faire oublier ses bases.
Et la mise en scène de Gosha va totalement dans ce sens. Il ponctue son film par de long plan en contre plongée, une manière de montrer que quel que soit le personnage, chacun va prendre l’autre de haut, se sentant supérieur et servant ses propres intérêts. Il n’y a plus d’égalité dans cette société. Bien sûr, rien à redire sur les combats, toujours aussi bien filmés. Et le fait que la nature ai ici une place particulière (la grosse majorité du film se passe en pleine montagne) permet d’avoir des combats qui utilisent bien l’espace (ceux dans la rivière notamment).
Et si finalement l’intérêt principal du film résidait plus dans la vision du Japon de l’époque par Gosha que sur l’histoire en elle-même ? C’est un peu le cas, si bien que cette course poursuite montagneuse intéresse plus que ne passionne. Malgré tout, Gosha signe un Chambara qui restera comme une valeur sûre du genre.