un superbe hymne à l'action
Vivre est un grand film humaniste qui montre comment chacun peut s'il le veut se rendre extraordinaire par l'action.
Kurosawa pose le sujet du film dans une introduction virtuose. S'y succèdent la voix off d'un narrateur objectif qui va scander tout au long du film le retour à la vie de Watanabe, les plans montrant la routine professionnelle de ce dernier et une succession de personnages montrant l'absurdité bureaucratique (lorsqu'un citoyen vient se plaindre per exemple d'une panne des canalisations, chaque agent le renvoie vers un autre service, ce qui est bien souligné par le montage haché), l'incompréhension des employés de service public face au désespoir du peuple. Vivre va alors se positionner sur deux aspects: le témoignage du Japon en crise et en proie au doute d'après-guerre et l'histoire d'un homme qu'une mort prochaine fait revivre.
Au cours de divagations de Watanabe en compagnie d'un écrivain, Kurosawa nous montre l'explosion du rock'n'roll et des rythmes latins auprès d'une jeunesse désireuse de fête malgré la dureté des temps. Watanabe semble d'ailleurs envieux de l'énergie et de l'enthousiasme de cette jeunesse face aux rythmes et aux modes de vie occidentaux. L'absence de Watanabe au travail crée immédiatement chez certains employés l'envie de prendre sa place plus tôt que prévu. Au travers de la jeune femme avec laquelle Watanabe sympathise, Kurosawa évoque la dureté du travail à l'usine. En quittant son emploi de bureau pour fabriquer des jouets, elle incarne la réponse de Kurosawa au désespoir: l'action. Et c'est par son attitude qu'elle donnera envie à Watanabe de reprendre le travail et de se réaliser dans l'action publique. Suit une seconde partie commençant après la mort de Watanabe et qui correspondra à la prise de conscience par ses collègues de son caractère extraordinaire et contiendra une dénonciation de l'arrivisme et de la corruption dans le service public.
Une des forces du film est sa construction en flash-backs: dans la première partie, les flash-backs sont la visualisation des regrets de Watanabe (situation de veuvage subie, incompréhension de ses enfants), dans la seconde, ils correspondent aux souvenirs qu'avaient de Watanabe ses collègues. Cette construction met en valeur la lutte de Watanabe pour faire construire un parc et se rendre utile à la collectivité, son obstination triomphant des menaces physiques et orales de ses adversaires.
Vivre est un superbe hymne à l'action: même quand un autre essaie de s'arroger la paternité de l'oeuvre de Watanabe, les journalistes et la population ne le croient pas parce qu'ils savent qui a vraiment été actif. Et suite à leur prise de conscience, ses collègues décideront que le meilleur hommage que l'on puisse rendre à Watanabe est de s'engager à son tour dans l'action et de tout faire pour assainir le secteur public.
Vivre réussit à concilier le local et l'universel: il montre le Japon luttant pour sortir de la crise et est aussi un hymne à l'action publique dans ce qu'elle a de plus noble.
"Bouiner" ou vivre, telle est la question
2h20 en noir et blanc avec une image d'outre-tombe et un son exécrable couronnés par une lenteur extrême, ça demande de la motivation pour ma part, et pourtant... Pourtant, quel chef d'oeuvre monumental.
J'aurais pu vous raconter une troisième fois l'histoire, sa construction exemplaire, ou encore vous parler de l'humanisme, du silence magnifiant le souci du détail et du geste, du style du maître qui nous vaut encore une fois une fantastique scène de réunion où les langues se délient, de la performance magistrale de Takashi Shimura, des personnages profondément humains car bourrés de défauts...
J'avais bien pondu un texte.... quasiment identique à celui de Ghost Dog, hors mis le coup de 3 hommes et un couffin qui me laisse perplexe... :)
Finalement, je n'ai qu'une chose à dire :
Ne lisez pas les critiques, elles ne peuvent que gâcher l'envie.
Histoire de ne pas l'avoir écrit pour rien et pour ceux qui aime lire trois fois la même chose je le met quand même :
Ne lisez pas ce qui suit...
Tao est un homme bon mais il est endormi, aveuglé par la monotonie de son travail (haut fonctionnaire / tamponneur exemplaire depuis 30 ans déjà), il a oublié que la vie est courte, mais peut-être pas qu’il peut encore la saisir tant qu’il est encore temps. Il apprend qu’un cancer de l’estomac ne lui laisse plus qu’un an à vivre, peut-être moins. Un flot de questions et de flashbacks le hantent alors sur ses 30 longues années de passivité où il a méthodiquement délaissé son fils alors qu’ils vivent sous le même toit. Ces questions le conduiront à vivre 4 jours non stop de nouba accompagné d’un écrivain porté sur la bouteille qui lui dit : « profites-en avant de mourir ! Viens avec moi, je vais te montrer la vraie liberté de la vie... Ce soir, je serais ton diable». Il ne trouvera aucune réponse ici à part une bonne envie de vomir.
Son souffle de vie naîtra par le sourire et l’énergie d’une jeune femme espiègle qui connaît sans le savoir et mieux que quiconque ce que signifie vivre. Elle travaillait pourtant sous son autorité mais il avait plutôt tendance à l’ignorer jusqu'à présent, comme tous les autres du reste. Il finit par entendre son bonheur, car vivre, ce n'est pas faire tout ce qu'on veut comme ça nous le chante pour trouver la liberté ailleurs, vivre c'est agir et construire grâce à la liberté qu'on a en soi. Tao ouvre les yeux, retrouve la liberté du coeur. La force nécessaire pour entreprendre et réaliser une ultime action voit enfin le jour. Agir pour vivre. Agir pour réaliser enfin quelque chose avant de mourir. Et « crack ! », une voix monocorde nous annonce que le personnage de cette histoire est maintenant mort...
La première partie du film est centrée sur Tao, Takashi Shimura magistral. Il est donc très perturbant d’assister à ses obsèques brutalement, avant même qu’il n’ait agi, comme si l’énergie du personnage nous manquait alors qu’il était sensé n’en avoir aucune. Pourtant, cette longue scène des obsèques entrecoupée de flashbacks est une merveille typique du style de Kurosawa où tout le monde est réuni dans la même pièce et où chacun prend la parole, s’interroge sur ce qui s’est passé et essaie de comprendre et de nous éclairer par la même occasion. C’est une galerie de personnages auxquels on avait même pas prêté attention durant la première partie qui s’ouvre du même coup. Un peu d’alcool et à manger ne peuvent qu’aider à délier les langues de ces fonctionnaires austères et faire naître les passions les plus folles.
Mais soyons réalistes. Peu d’entre eux auront vraiment compris Tao et sa brutale envie d’agir. Même pour le spectateur, quelle surprise de découvrir la simplicité de l'acte vital entrepris par Tao.
Et pourtant, quel plus bel acte de permettre la construction d'un parc à jeux dans un quartier pauvre. Un acte qu'il entreprend simplement au sein de son administration au lieu de rester vissé sur sa chaise. Un acte que peu connaîtront mais que tous les habitants du quartier louent chaque jour. Car vivre, ce n'est pas agir pour grandir ou chercher un absolu. Vivre, c'est agir pour le plaisir d'aimer et de partager. On ne cherche pas la liberté et l'amour. Ils vivent en nous.
... Car tout ce qui vient d’être dit ne peut que tuer l’envie.
Les vertus de l’alcool
La comparaison est peut-être osée, mais Vivre (1952) est en quelque sorte l’extension 30 ans après de 3 hommes et un couffin (entre autres), cette comédie des années 80 de Coline Serreau qui démontrait par le biais d’un trio de trentenaires célibataires que le but de la vie est de la consacrer à ses enfants. Le héros du film de Kurosawa (Watanabe Kanji), lui, l’a cru aveuglément au point de ne pas se remarier après la mort de sa femme, simplement pour élever au mieux son fils en se tuant à la tâche dans un travail de paperassier sans intérêt. Mais arrivé à l’âge de la retraite, il découvre qu’il est atteint d’un cancer de l’estomac et qu’il ne lui reste que quelques mois à vivre. Il prend soudain conscience de sa condition de mortel et analyse sa vie, cette vie triste où finalement ni le travail, ni les femmes, ni même son fils ingrat n’ont été des facteurs d’accomplissement et de reconnaissance sociale, ces fameux critères figurant au sommet de la pyramide de Maslow. Alors il se jette dans une course effrénée contre la mort et tente d’effectuer une dernière action, juste et utile, afin de laisser l’empreinte de son passage sur Terre avant de la quitter définitivement.
Bouleversant, cet hymne à la vie, bien que parfois un peu lent, touchera tout le monde, puisque chacun d’entre nous s’interrogera forcément un jour ou l’autre sur ce qu’il a fait de sa vie, et quel a été son sens. Kurosawa, en grand humaniste, nous montre que c’est par l’action et la compréhension des autres que l’on devient quelqu’un de respectable que l’on honorera même à titre posthume, tout en brossant le portrait d’un pays au point mort économiquement, ravagé en profondeur par la seconde Guerre Mondiale. Shimura Takashi y est absolument formidable ; sa voix cassée, son air de chien battu et surtout la chansonnette poussée au milieu et à la fin du film ne sont pas prêts de s’effacer des mémoires.
Après une première partie centrée sur la prise de conscience de Watanabe, la seconde partie du film embraye brutalement sur l’hommage au héros par ses collègues de bureau lors d’une veillée funèbre fascinante. De manière très originale, Kurosawa dévoile leurs hésitations coupables concernant leur attitude face au dernier combat de Watanabe, tout en revenant par flash back sur la vie de ce dernier. Grâce au sake copieusement avalé, les langues de serpent vont se délier et la vérité éclatera enfin au grand jour : l’inefficacité chronique de l’administration a été largement secouée par la volonté sans failles du héros d’aller jusqu’au bout de son idée : construire un parc, envers et contre tout.
Envers et contre tout, il faut maintenant défendre ce film de 50 ans d’âge à l’émotion et à la puissance intacte, et le faire voir au plus grand nombre car, à la manière d’un bon vin, il se bonifie avec le temps…
Chronique dramatique pleine de douceur.
Ikuri d'Akira Kurosawa est un film génial. Pas dans le sens le plus couramment utilisé ("ça c'est génial, ça aussi...") mais plutôt dans sa forme la plus prestigieuse où en creusant bien on y découvre "géni". Car oui, cette énième claque de Kurosawa relève du géni pur et simple dans la mesure où l'histoire -prenante- fait office de remède contre les coups de blues. Quand on regarde Ikiru, on pense immédiatement à une chronique sur le mal-être, sur la perte de confiance d'un homme dont la vie va basculer lorsqu'un médecin lui annonce qu'il est atteint d'une pathologie incurable. Il ne lui reste que quelques mois à vivre et convaincu du ratage complet de sa vie, décide sur un coup de tête de profiter de ses derniers moments pour faire le bien autour de lui.
Ikiru intervient à un moment où Kurosawa vient d'enchaîner classiques sur classiques, bien calé avec The Idiot et Scandale, excusez du peu. Si j'en parle c'est parce que dans le fond, j'ai cette drôle de sensation d'avoir vu des rapprochements entre les oeuvres citées et Ikiru. Déjà, l'humanisme fort et la bonté qui caractérisent le personnage de Watanabe font tout droit penser au personnage de The Idiot. Renfermé, timide mais généreux, Takashi Shimura est le double absolu de Mori Masayuki. Ensuite, dans la même veine que l'excellent Scandale, on peut trouver de sacrées ressemblances entre l'avocat blasé et Watanabe notamment dans leur descente/remontée aux enfers, ou alors dans leur aspect de petit personnage trapu lunatique un chouya alcoolique. A ce propos les séquences à la fois dans Scandale et Ikiru mettant en scène Shimura poussant la chansonnette se complètent à tous les niveaux : mélancolie, désespérance, envie de suicide...
Impossible de rester insensible face à la force dramatique de l'oeuvre de Kurosawa, rien que pour la bonne bouille de Shimura, grand clown triste et grand acteur du cinéma japonais classique. La profondeur de son personnage est énorme, alternant les émotions positives (amour/amitié, joie) et négatives (se noyer dans l'alcool pour oublier, peur d'échouer, suicide...) à vitesse grand V, Takashi Shimura est bien loin du samouraï qu'il incarnera deux ans plus tard. On se demande même si Ikiru n'est pas plus jeune, dans la mesure où Shimura semble tellement plus âgé et définitivement plus affaiblit que d'habitude. Que dire par exemple de la séquence culte de la balançoire où l'on y voit un homme entrain de s'éteindre sur le propre terrain qu'il a construit? Un véritable compliment de ma part qui prouve que cet homme peut tout faire, que ce soit le samouraï leader ou le vieillard malade.
Dans son ensemble, Kurosawa réalise une petite prouesse technique au niveau de la mise en scène, d'une sidérante variété. Alternant plans fixes d'une longueur parfois affolante (exigeant le sans faute au niveau de l'interprétation des comédiens), petits plans séquences, travellings, zooms traumatisants sur le visage de Shimura, une véritable petite performance surtout quand on sait que Kurosawa utilisait une seule caméra à l'époque. Ikiru, film parfait alors? J'en aurai rêvé mais ce ne sera pas pour cette fois. Certes le film est exemplaire en bien des points, touchant et drôlement poignant, mais dès l'instant où l'on apprend le décès -inévitable- de Watanabe, on tombe dans le drame larmoyant, prétexte pour évoquer les grands moments de ce monsieur trop vite partit, de la réussite de son parc, etc. Kurosawa établit d'ailleurs une critique de la société nippone où les hommes dits forts et importants sombrent aussi vite dans l'alcool que dans leurs dossiers.
On a qu'une vie, vivons la pleinement, c'est ce dont aurait voulu Kurosawa.
Un monument du cinema
Ikiru passe pour etre le film prefere de Kurosawa. Construction astucieuse, qualite incroyable de l'interpretation (hallucinant Shimura Takashi) et genie total de la mise en scene du realisateur. A travers cette histoire simple (un employe apprend qu'il n'a plus que quelques mois a vivre), Kurosawa exprime avec force sa vision du monde, cette terre miserable que l'homme transfigure par son action. Theme qu'il reprendra plus tard dans un autre chef d'oeuvre absolu, Akahige avant d'apparaitre plus "ambigu" dans Dode's Kaden. C'est d'ailleurs ses films humanistes, plus encore que ses autres chefs d'oeuvre et notamment ses films de samourai, qui font de Kurosawa mon cineaste prefere, l'un des plus grands artistes de l'histoire, l'egal d'un Dostoeivski ou Hugo! Bref, Ikiru est un chef d'oeuvre absolu, un monument du cinema. La scene du bar ou Watanabe se met a chanter, en pleurs est l'une des plus poignantes, bouleversantes...
Sublime !
Je ne m'attendais à rien en m'installant devant ce film, j'ai tout eu... Un film poignant qui nous saisi au plus profond de nous même. C'est vrai qu'un film en noir et blanc, japonais sous-titré français, n'est pas forcémment très tentant, mais il faut laisser ses a piroris de côté et se lancer sur les traces de cet homme qui profite des derniers instants de sa vie à sa manière...
La belle thématique de la mort et de la vie, étroitement liées, est exploitée à merveille.
C'est un grand film par les émotions qu'il procure.
5+
le plus beau film que j'aie vu, toutes catégories confondues
Le sens de la vie
Vivre est une véritable fresque sur la prise de conscience d'un homme qui lorsqu'il s'apprend atteint d'un mal incurable se décide enfin à sortir de sa léthargie. C'est également un hymne à l'acte social. Comme tout le monde le sait, Akira Kurosawa est sans doute le plus grand cinéaste humaniste de tous les temps. Toute sa filmo est basée sur ce véhicule d'idées positives. Même lorsqu'il pose sa caméra dans les endroits les plus sombres, il rechercher toujours la lumière, l'espoir.
La raison d'être d'un homme doit se trouver dans l'action, il ne doit s'affirmer que dans cette acte. Une action en faveur des autres, des plus défavorisés, des plus faibles.
Vivre est un véritable hymne à la vie aussi. Une vie qui ne trouve d'éveil qu'à son crépuscule.
Takashi Shimura est stupéfiant de justesse dans le rôle d'un homme que le sort n'a pas épargné. Un homme qui décide de se lever quand le sort voudrait qu'il se couche.
Le film est bâtit en trois segments distincts.
La première partie montre un homme que sa fonction dispose à stagner. Il n'existe que dans son inaction et semble coincé par les lenteurs et les régles d'une société qui l'ont empêchées d'exister en tant qu'individu. Petite homme au visage fermé, assis derrière un bureau sur lequel repose des amoncellements de paperasses qu'il tamponne tel un robot. Un homme mort en somme. Une voix-off le présente comme un outil d'une société immobiliste.
Lorsqu'il apprend qu'il est atteint d'un cancer, il s'appitoye d'abord sur son sort, puis se met peu à peu à s'éveiller sur le monde. Il se décide subitement de vivre. Comme ci l'approche de la mort semble lui faire prendre conscience de son existence.
Dans la seconde partie, il se met à vivre et à découvrir les effets bénéfiques du mouvement. La réalisation de Kurosawa devient alors plus dynamique et animée. L'homme entre dans la notion de mouvement. Il avance soit vers l'inéluctabilité, mais aussi vers les autres. Il use alors de toute son énergie au service d'une action.
Dans la troisième partie, après une nouvelle intervention par la voix-off nous apprenant sa mort, on assiste à un long intermède entre plusieurs personnes l'ayant cottoyé dans son inaction. Et par morcellement, chacun prend conscience que cette homme au demeurant passif a su s'élever en tant que décideur et à finalement changer la vie des autres. Il a donc agit, sa vie a donc servi et sa mort le fait finalement enfin vivre aux yeux des autres.
Cette troisièmre partie est typique du cinéma de Kurosawa, où des hommes se réunissent et se mettent à débiter des paroles de vérité sous l'effet de l'alcool. Chacun campe d'abord sur ses positions, pure notion d'invidualisme.
Au milieu de la salle de deuil se trouve le portrait du défunt qui semble contempler l'assemblée avec le regard de la sagesse. Subitement se portrait semble prendre vie et se gosser de la bêtise de cette assemblée.
Plus la scène progresse, donc plus il ya notion de mouvement donc d'action, plus les mentalités se mettent à changer et se dirige vers une sorte de positivisme. C'est alors que l'on prend soi même conscience de la puissance évocatrice du discours que tient le maître.
On assiste bouche bée à une scène remarquable, montrant notre défunt héros sur une balançoire d'enfant chantant un air triste.
L'oeuvre peut se conclure sur une note positive et progressiste.
Remarquable en tout point, la réalisation du grand Kurosawa est d'une maîtrise totale. Ce film est un immense hymne à la vie qui parle de la mort. La notion de morale chère au maître est ici plus présente que jamais, mais jamais pesante et réprobatrice. Elle cherche simplement à faire prendre conscience des choses. Ici, l'action individuelle au service de la société. Humanisme quand tu le tiens.
Chef-d’œuvre humaniste
Magnifique ode à l'humanisme, œuvre chargée de justesse et d'émotion, amère évocation de la misère sociale nippone de l'époque, illustration des préoccupations de son auteur vis-à-vis de la mort et de la manière de l'accepter,
Vivre est tout cela et bien plus encore, il s'agit tout simplement d'un des plus beaux films jamais réalisés. Kurosawa divise son récit en deux parties distinctes: la première narre le chamboulement de l'existence de M. Watanabe, patron d'un bureau administratif, après avoir appris qu'il ne lui restait qu'une poignée de mois à vivre. Déboussolé, l'homme se laisse aller à des élucubrations bien arrosées avec un barman pour compagnon puis s'entiche de son employée, une jeune fille démunie dont il admire l'insouciance et la vitalité. Mais lorsque cette dernière n'approuve plus les sorties vaines avec son supérieur hiérarchique et apprend la réelle cause de son caractère sombre et tourmenté, elle l'abandonne. On passe alors directement à la seconde moitié de l'histoire qui nous expédie cinq mois plus tard en mettant en scène l'après-cérémonie de l'enterrement de M. Watanabe, décédé la veille dans un parc fraîchement inauguré. Les employés administratifs ayant travaillé avec le défunt cherchent à savoir si celui-ci est véritablement responsable ou non de l'existence dudit parc. Kurosawa insert de nombreux flash-backs afin d'exposer les souvenirs des personnages réunis circonstanciellement et l'on finit par apprendre que Watanabe a sacrifié les derniers temps de sa vie à la mise en marche du projet qui consistait à la transformation d'un terrain vague en place d'attractions destinée aux enfants. Grâce aux efforts du bonhomme et de personne d'autre – faits qu'un ignoble échevin cherchera à contredire –, l'aboutissement aura eu lieu. On ne sait trop de
Vivre si la critique sociale d'une profonde amertume dispensée par Kurosawa prend le dessus sur le mélodrame psychologique dépouillé ou alors l'inverse. Une chose est néanmoins sûre: rarement le cinéma n'aura connu d'instants de grâce aussi denses que celui où M. Watanabe chante un petit air d'espoir de sa voix éraillée et mélancolique sur une balançoire, celle de son parc, que les regards à la fois pétris de désespérance, de frayeur, d'incertitude et de tristesse d'un homme terrifié à l'idée de mourir avant d'avoir suffisamment vécu, mais également ses derniers rires, ses dernières joies et ses dernières volontés. Bouleversant de sincérité, Takashi Shimura s'adonne à une composition poignante que l'on n'est pas prêt d'oublier. Nul doute qu'Akira Kurosawa avait déjà tout dit, tout donné et tout prouvé à partir de
Vivre, n'en déplaise aux autres classiques du cinéaste nés par la suite dont certains (citons
Ran) semblent même surfaits à l'aune d'un film aussi abouti sur tous les plans.
Histoire bouleversante
Ce film est un chef d'oeuvre bouleversant. La prestation de shimura est vraiment extraordinaire, sûrement sa meilleure performance, un visage qui porte tout le film : comique, tristesse, espoir, volonté... Et bien sûr, Kurosawa maitrise son sujet, donc on a forcément un grand film. Petit bémol, les dernières minutes sont un peu longues, mais c'est juste un détail.
crépusculaire
Drame essentiel sur l'importance de l'action dans la vie, l'existence et son sens, le récit très riche et sa forme originale sont rythmés de main de maitre par Akira Kurosawa.
Takeshi shimura offre l'une de ses meilleurs prstations.
Gigantesque
Petit grand homme
Première oeuvre synthétique de tout ce que Kurosawa avait pu réaliser jusque-là, "Vivre !" annonce également le merveilleux de ses dernières oeuvres dépouillées.
Un individu moyen s'affirmant (pratiquement tous les films de Kurosawa depuis son premier "Grande légende de Judo 1"), se dépassant dans une petite cause pourtant si noble; atteint d'une maladie (nouveau regard sur la médecine après "L'Ange Ivre" et le "Duel Silencieux") et surtout, surtout une seconde partie au moins aussi innovatrice point de vue mise en scène que son précédent "Rashomon".
Ce long film est assez austère, car bien trop lent, mais constitue une magistrale léçon de langage cinématographique pour tout cinéphile averti.
Faisant intervenir une voix off d'outre-tombe, qui annonce et introduit les événements à venir par quelques moments inattendus, l'histoire se concentre - dans une première partie - sur un fonctionnaire moyen. Apprenant, qu'il ne lui reste plus que quelques mois à vivre et ne trouvant de réconfort auprès de son fils (dans une magnifique et poignante scène de méprise de situation), il ira tout d'abord rattraper le temps perdu. Nouveau regard du cinéaste sur la folle énergie animant les paradis artificiels au cœur même d'un pays toujours en ruines, la longue quête de l'homme le mène à travers une folle jeunesse en délire sur des airs et mœurs américains.
La rencontre avec - une nouvelle fois - une JEUNE femme croyant en l'avenir, lui donnera le déclic de se trouver une dernière raison de vivre et - surtout - d'accomplir quelque chose.
Arrive alors une rupture totalement attendue dans le flux autrement classique de l'histoire et qui constitue une rare idée de mise en scène de génie : un flash-forward (bond en avant) fait bondir l'action de près de cinq mois en avant. Le héros de l'histoire est à présent décédé, mais son "oeuvre" apparemment accompli. A travers les discussions au présent / futur et quelques flash-backs, toutes les démarches et derniers jours de la vie du fonctionnaire sont retracés et ainsi dévoilés petit à petit au spectateur. Le retour sur le passé par différents protagonistes renvoie directement sur "Rashomon", combien même les protagonistes ne racontent pas chacun à leur façon un seul et même épisode. Le précédent film en tête et le terrible constat du réalisateur, comme quoi l'homme ne peut s'empêcher de mentir et de s'accaparer une vérité à sa manière, il est difficile de faire le tri entre vrai et faux dans les témoignages; idée renforcée par l'interprétation et la recherche d'explications dans les agissements du personnage principal par les principaux invités à ses funérailles, à commencer par savoir si oui ou non, le fonctionnaire se savait condamné et les bonnes rumeurs concernant sa supposée affaire avec une jeune femme.
Cette seconde partie - une nouvelle fois expressément rallongée pour mieux caractériser l'inertie des hommes parlant du fonctionnaire et du temps qui passe, sans que ces gens daignent entreprendre quoi que ce soit de leur vie - est un génial puzzle de mise en scène, mélangeant les styles pour former l'image complète et la partie - normalement CENTRALE du film - manquante. Totalement décontenançant pour un spectateur rôdé aux structures classiques, Kurosawa va très loin dans une inventivité géniale.
Film austère dans son approche simple, il s'agit d'une magistrale claque cinématographique.
les vieux films ne sont pas forcément ma tasse de thé, celui ci se regarde assez bien malgré l'age. le message et les émotions que fait passer KUROSAWA m'ont fait apprécier VIVRE, malgré cela je l'ai trouvé un peu trop délayé, une demi heure de moins aurait rendu le film plus efficace je trouve, surtout la derniere partie qui ne m'a pas trop emballé. le film ne manque pas d'intéret donc on peut passer outre ses quelques défauts.
Une belle oeuvre certes, mais j'irai pas jusqu'à parler d'un chef-d'oeuvre exceptionnel...
Parlons des bons côté tout d'abord. Le film est rempli d'un contraste constant entre optimisme et pessimisme, c'est usant pour le moral et les nerfs, mais quel plaisir ! Et quelle prouesse également pour un acteur de pouvoir soulever ces sentiments aux spectateurs pendant plus de 2h ! L'acteur en question ? SHIMURA Takashi, qui a interprété magnifiquement son rôle, n'est pas à sa première collaboration avec Kurosawa (et il y en aura d'autres après ce film également) : Chien Enragé, Rashomon, Scandale, L' Idiot, Les Sept Samouraïs, Vivre dans la peur, Le château de l'araignée, La Forteresse Cachée, Les Salauds dorment en paix, Le Garde du corps, Sanjuro, Entre le ciel et l'enfer, Barberousse, Kagemusha...
La liste est longue, impréssionnante... ils ont formé un véritable trio d'élite -Kurosawa/Shimura/Mifune- pour le cinéma japonais des années 50~60, quelle équipe ! :D
Vivre restera surement l'oeuvre la plus apréciée de Kurosawa. Tout au cours du film on se rends compte de l'investissement du réalisateur dans le récit ; on le sent imprénié, touché, profondemment concerné !
Le scénario est très humaniste, humble et grand à la fois, comme beaucoup de films de Kurosawa d'ailleurs. On sort toujours d'un de ses films avec l'esprit mi-rêveur, mi-réaliste, mais aussi toujours avec ce petit mal être qui selon moi rongeait les personnages et que Kurosawa (et ses acteurs) savait tant transmettre à son public. Bref, une bonne réflexion de fond accompagne souvent le silence d'après film, particulièrement pour Vivre, qui glace le sang, émeut, et réchauffe les coeurs à la fois.
Venons-en ensuite aux aspects plutôt négatifs du film. Selon moi le film traine trop en longueur, 2h20 est beaucoup trop long pour une histoire comme celle-ci. Bien que la volonté de Kurosawa soit de suivre notre vieil acteur aussi fidèlement que ses gestes, avec la lenteur qui les caractérise, il en fait parfois un peu trop, et le film failli de virer plusieurs fois dans un tragique mélo contemplatif assez @!#$. Heureusement ceci n'arrive pas, mais je suis persuadé que racourcir le film d'une demi heure n'aurait pas été un mal, 1h50 auraient largement étées suffisantes.
Autre petit bémol, le choix musical n'est pas vraiment folichon. Seule la chanson chantée par l'acteur principal relève un peu le niveau de la bande son. Au niveau technique n'en parlons même pas, il ne faut vraiment pas être exigent pour supporter sans broncher des prises de son "friture des années 50", j'avoue que ça me dérange toujours quand je regarde des vieux films. Pour les sous-titres, mon édition (CDiscount) n'est vraiment pas terrible, il manque régulièrement des petits bouts de dialogue, c'est assez énervant.
Enfin voila, considérant le film dans sa globalité, je lui trouve une panoplie d'avantage pour une poignée de petits défauts, ce qui me conduit à dire qu'il s'agit là d'un très bon film, sans pour autant crier au chef d'oeuvre !