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Une femme dans la tourmente

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Ordell Robbie 3 Hésite entre drame, intimisme et satire sociale sans réussir à se trouver
Xavier Chanoine 3.75 Un très beau film aux émotions diverses.
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Un très beau film aux émotions diverses.

A l'heure où les grandes chaînes de supermarché bouffent littéralement tout sur leur passage au détriment de petits commerces qui tentent de s'implanter, en vain, Naruse Mikio dressait déjà un premier bilan sur ce phénomène via une chronique pleine de justesse sur le parcours social et sentimental de deux personnes : Koji et Reiko.

Reiko, femme mûre et veuve depuis peu, tient une épicerie dans une rue commerciale populaire. Son employé, Koji, ne fais pas vraiment tout son possible pour l'aider et accumule les siestes alors que les livraisons de saké attendent. Las de ce train-train et ne sachant plus quoi faire, elle perd espoir. Un espoir qui sera définitivement enterré lorsqu'elle apprend qu'un supermarché vient d'ouvrir dans le coin et que les oeufs y sont deux fois moins chers. Ca vous dit quelque chose ce phénomène? Petites entreprises contre multinationales? Naruse témoigne alors du danger que représente ces grosses sociétés face aux humbles petits commerces réduis à s'aligner sur leur prétendant et obligés de proposer des tarifs plus bas, entraînant alors une perte d'argent évidente.

En parallèle, Tourments est aussi un pur film dramatique sur l'amour impossible entre Reiko et Koji que tout oppose. L'un écume les bars et passe le plus clair de son temps les bras croisés, tandis que l'autre tiens courageusement un commerce et tente d'oublier la disparition de son mari. Koji le comprend, et pour conquérir le coeur de sa "patronne" il n'hésitera pas à améliorer son image en bossant d'avantage et en dévoilant ce qu'il ressent pour Reiko. L'oeuvre verse alors dans le sentimental nian-nian tout en étant respectable dans le fond puisque Naruse évite la facilité de tomber dans le larmoyant pur et simple, et distille avec efficacité différents parfums : moments sympathiques, rigolos, tristes ou mélancoliques, théâtre de performances scéniques carrément louables. Le jeune docteur de Barberousse, Kayama Yuzo, est absolument génial dans la peau de cette feignasse de première, changeant radicalement de personnalité lorsqu'il doit "impressionner" sa patronne, interprétée par Takamine Hideko que l'on a découvert auparavant dans Choeur de Tokyo d'Ozu pour l'un de ses premiers rôles, ou encore dans La condition de l'homme 3 de Kobayashi.

Démarrant avec sourire et entrain, Tourments bascule au fur et à mesure dans le nostalgique et le triste romantisme avec l'explosions d'amour et de haine de Reiko (la séquence dans le train annonce le meilleur pour finalement laisser place au pire un peu plus tard). De plus, si l'esthétique semblait au départ austère (quelques intérieurs, une rue commerçante déserte...), Naruse dévoile des paysages extraordinaires en fin de métrage avec ces collines brumeuses et ses grandes bicoques japonaises traditionnelles à plusieurs étages, filmés dans un élégant Tohoscope des familles au noir et blanc éclatant.



06 décembre 2006
par Xavier Chanoine


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