- Tu trouves pas que ça sent sérieusement la vase, Lyne ?
- Oh que oui ! Il faudrait prescrire un bon dentifrice.
- Le moins que l’on puisse dire, c’est que la mayonnaise ne prend pas.
- En tout cas, moi je ne marche pas.
- Tu boites trop.
- Non, toi tu bois trop.
- Tube-watt-trop. Bruyant, non? Pourtant, ça n'était pas très Rock hein…
- Pas très Speed non plus. A cause de ce film j’ai aussi l’impression d’avoir passé Une journée en enfer tu vois.
- Ouais, je vois. Moi j’avais une sensation de noyade.
- Tu veux un tuba ?
- Pour qu’il me pompe encore l’air? Certainement pas !
- Tu bas des records là.
- Tube bat des records.
- Mouais... Quoi qu’il en soit, on s’est bien fait entubés.
- On arrête, j'ai mal au crâne avec nos délires là…
- Ah ouais ? Tu veux de l’aspirine ?
- Ok, passe moi le tube.
Au risque de se répéter encore et toujours, voir un gros film d'action coréen revient à voir un gros film d'action US, avec une petite touche nationale de temps en temps. Avec Tube, on ne retrouve même plus les touches intéressantes d'un Shiri (l'opposition Nord Sud et la romance dramatique), on garde l'efficacité et les qualités techniques, mais c'est sans aucune originalité ni style.
Alors au menu, grosses scènes d'action où on distribue de la cartouche à ne plus savoir qu'en faire, musique Hans Zimmer plutôt correcte mais qui reste une copie sans inspiration, romance et dramatisation très bateau et sans grand effet, rythme assez soutenu. On ne s'ennuie jamais vraiment dans Tube, mais l'ensemble souffre de trop d'imprécisions et de superficialité pour monter au dessus du blockbuster bourrin et sans âme. La romance est plutôt ratée, la faute à des flash-backs trop courts qui n'impliquent pas vraiment le spectateur, les scènes d'action sont correctes mais peu réalistes (les forces spéciales s'en prennent à nouveau plein la figure, c'est une spécialité coréenne) et les personnages semblent trop caricaturaux ou trop rapidement ébauchés. Bref, ça ne prend pas, l'efficacité n'est pas là comme elle pouvait l'être avec Shiri ou 2009. C'est peut-être une histoire de sensibilité, mais il vaut mieux être bien préparé aux clichés et poncifs en tout genre pour être ému par cette histoire.
Reste la grosse piste son, le rythme très soutenu et l'excellent niveau technique de l'ensemble pour contenter les fans de boum-boum sans prétention. Mais comme le film ne passe pas un soir sur M6 à 22h30 mais coûte plutôt dans les 30€, on a de quoi être un peu déçu par ce spectacle qui manque un peu d'ambition et surtout de style. Si vous avez déjà vu Speed et Rock, inutile de débourser trop pour ce film qui en repompe allègrement tous les concepts. Autrement pourquoi pas, le film n'est sûrement pas plus mal fait qu'un blockbuster US de base.
Si Baek Woon-Hak possède un savoir-faire technique à peu près égal à la moyenne hollywoodienne, son blockbuster Tube ne brille cependant pas par leur scénario ou par son originalité. Reprenant la trame d’un Speed dans le métro de Séoul, il enchaîne avec une volonté inquiétante les invraisemblances et absolument tous les clichés du genre. Manichéen au possible, son œuvre se laisse voir en tant que divertissement, mais gonfle franchement quant aux ressorts dramatiques maintes fois utilisés.
Avec l'inflation budgétaire dans le cinéma d'action qui a bien failli mettre en péril la santé financière de l'industrie cinématographique coréenne, on croyait que le cinéma coréen se mettrait en grève du blockbuster d'action. Qui plus est, après avoir porté aux nues le cinéma coréen, les amateurs d'action made in Asia semblent l'avoir désormais un poil délaissé pour la Thailande sur la foi du seul Ong Bak.
Tube tendrait à prouver que la Corée ne semble malgré tout ne pas vouloir totalement abandonner la partie, ce qui se comprend vu que ce ne sont pas les comédies romantiques ou les sous-Tarantinades qui sont vendeuses dans les Marchés du Film mondiaux. Surtout que s'il y a un peu moins d'argent les techniciens, grande force de leur cinéma, sont toujours là et qu'entre un Hong Kong incapable de produire assez d'Infernal Affairs pour ranimer son industrie, un Japon qui ne connait pas le mot export et une Thailande qui n'a pas encore assez d'argent dans son industrie pour rivaliser on voit mal qui pourrait les mettre en difficulté. Sauf que le moins d'inflation budgétaire ne semble pas pousser pour le moment à la recherche d'une vision neuve du cinéma de genre. Tube ne fait que reprendre ce qui a fait du cinéma commercial coréen un cinéma d'un bon niveau technique mais impersonnel. Tous les ressorts du scénario avec ses situations mille fois vues -la prise d'otage dans un wagon, le flic aux méthodes trop expéditives, les histoires d'amours pour ajouter de la tension aux scènes d'action- et ne comportant aucun ancrage dans la réalité locale semblent plus provenir d'un étude de marché que d'un scriptwriter inventif.
Sauf que si le scénario n'invente pas la poudre sa mise en scène ne sait pas non plus la faire parler: les mouvements de caméra ne sont pas tous mauvais mais ressemblent plus à du filmage de technicien qu'à un vrai regard de cinéaste. Pour le reste, le film a déjà commencé qu'il a déjà offert un grand nombre d'explosions, des caméras portées rendant l'action illisible et quelques accélérations clippeuses et ravellings brusques en mettant plein la vue tout en étant proche du zéro niveau émotion, bref rien de nouveau sous le soleil du cinéma coréen. Cette alternance pyrotechnie sans ame/style caméra à l'épaule peu inspiré/accélérations clippeuses/mouvements brusques de caméra pour l'épate/filmage bateau (sans compter un usage pas toujours judicieux des flashs) se poursuivra durant tout le (trop long) temps d'un film rythmé par un score sous-Hans Zimmer.
Tube se débrouille en plus pour gacher son très peu de bonnes idées: son combat en face à face à l'arme blanche par le style caméra à l'épaule déjà mentionné et l'idée du héros avec la clope au bec qu'il n'allume jamais par le manque de charisme de son acteur principal. A part ça, quand ils essaient un peu de surjouer, les acteurs coréens se plantent encore. Passons aux seuls éléments qui auraient pu apporter un peu de touche locale -avec le doigt coupé du flic censé ajouter de la dramatisation à la confrontation mais sans lequel le scénario pourrait quand meme exister-:la romance. Cette dernière est complètement ratée: manque de développement narratif, choix musicaux plus mièvres que fleur bleue et traitement terne plus proches des mauvaises comédies romantiques américaines que de l'exçès flamboyant des meilleurs Woo HK, le film n'allant jusqu'au bout de ce potentiel mielleux sur la fin en sortant enfin son slow sirupeux mais c'est un peu tard...
Au final, le film ne rassure pas sur la capacité de l'industrie cinématographique coréenne à se remettre en cause dans une situation moins favorable qu'avant et à essayer d'apporter du neuf sous le soleil du cinéma de genre. Si la Corée a apporté au cinéma asiatique des auteurs intéréssants au rayon festivalier, ce n'est toujours pas le cas au niveau de son cinéma mainstream.