Arno Ching-wan | 3.5 | Grosse frousse |
Ordell Robbie | 2 | La médiocrité se perd... |
Trop tiré en longueur et un peu trop bavard par endroits, ce film n'en diffuse pas moins quelques magnifiques scènes d'horreur et gores que n'auraient pas renié Nicolas - Ne vous retournez pas - Roeg et Lucio - L'Au-delà - Fulci. Pour ce qui est du scénario, il est tiré d'un livre de Yokomizo Seishi, adapté ici par Hashimoto Shinobu, le scénariste à l'origine des Rashomon et Les Sept Samouraïs de Kurosawa. Pour ce qui est de la trame, on se rapproche d'une histoire de type Fog (J. Carpenter), avec une intrigue familiale et historique plus complexe. A la fin du XVIème siècle, huit samourais fugitifs viennent se réfugier dans un village après - on l'imagine - une dure bataille. Puis, de nos jours, en 1977 (hum), un jeune homme retourne dans son village d'enfance, le même, pour y découvrir quelques secrets obscurs (certains ajouteront "innommables", "indicibles", voir même "cyclopéens").
Quelques passages bien bis font sourire: le samourai revenant d'entre les morts avec deux lampes de poche sur la tête flinguant tous azimuts, une tête coupée s'envolant pour, toujours active, mordre un bras à l'arrivée, une autre tête à moitié tranchée et encore pendante etc. Ces excès auraient pu être préjudiciables à l'ensemble à cause d'un second degré malvenu mais il n'en est rien grâce à un scénario bien écrit et une BO épique allant crescendo jusqu'au final, long, flippant et mémorable. Peut être même un peu trop flippant et mémorable d'ailleurs ! Une excellente péloche populaire, ce qui n'est en rien péjoratif.
Bien avant cette version signée Nomura Yoshitaro, le roman policier de Yokomizo Seishi Le Village aux 8 tombes fut adapté au cinéma en 1951 par Matsuda Sadatsugu (et on ne compte pas les versions télévisées...). Cette version d'une des aventures du détective Kindaichi s'inscrivait alors dans une vague d'adaptations cinématographique et thétrales du romancier à succès. La version de Nomura se retrouve elle synchrone d'une autre vague d'adaptations. En 1976, Kadokawa Haruki, président des éditions Kadokawa, souhaite rééditer les romans de l'écrivain ayant fait la gloire de sa maison assortie d'une série de films lancés à grands renforts de publicité. La première adaptation est confiée à Ichikawa Kon: c'est La Famille Inugami, succès qui lancera une vague d'adaptations de l'écrivain y compris dans les autres compagnies. Pour l'anecdote, Ichikawa offrira d'ailleurs sa version du Village aux 8 tombes en 1996 et va remaker sous peu sa Famille Inugami.
Mais revenons-en à la version de Nomura Yoshitaro. Cette dernière se laisse suivre sans déplaisir sans pour autant laisser une trace impérissable. Malgré sa longueur, le film est assez bien réglé rythmiquement. Les rebondissements interviennent assez régulièrement sans faire dans l'artifice narratif et la narration en flash backs est utilisée de façon pas renversante mais bienvenue. Associé à des acteurs oscillant entre l'excellent (les premiers roles) et le bon, le script offre au film des personnages assez consistants pour maintenir un minimum d'intérêt d'un bout à l'autre. Quant au score d'Akutagawa Yasushi, il est de bonne facture meme si l'usage répété de certains de ses thèmes finit par agaçer. Sauf qu'en plus d'être attendues les pistes narratives empruntées ne le sont ni avec brio ni avec originalité. Qui plus est, le film souffre d'un manque flagrant d'ambition formelle, oscillant entre platitude et effets datés (les zooms brouillons) ou convenus.
On est ici trop souvent proche d'une certaine esthétique télévisuelle qui avait fini par contaminer une bonne part du cinéma populaire nippon de l'époque. Meme si comparé à un cinéma populaire nippon contemporain capable de fournir le pire du cinéma asiatique actuel les relatives qualités d'un tel produit rendent presque nostalgique...