A World Without Thieves montre que la Chine en matière de films grand public fait de grands pas. En effet, le film met en scène Andy Lau Tak-Wah et René Liu dans la peau d'un couple de voleurs au bord de la rupture. Elle veut tout arrêter et mener une vie normale mais lui, qui se considère comme un maître, ne peut se décider à quitter sa vie qu'il aime tant. Le couple en montant dans un train rencontre le jeune Dumbo (Wang Bao-Qiang), grand naîf qui rentre au pays avec ses économies afin de se marier. Envoyer son argent par la poste lui paraissant trop cher, il décide de le prendre sur lui ; éxaspéré que ses amis lui reprochent trop, il lance le défi à quiconque montant dans le train de lui voler son argent pour prouver à ses amis et collégues qu'il ne craint rien. A tort car il va ainsi s'attirer l'interêt d'Andy Lau qui voit en cela une insulte à son art, mais aussi d'un groupe de voleurs mené par Ge You montant également dans le train. Les voleurs vont donc s'affronter entre eux afin de savoir qui mérite de voler l'argent.
Le thème du film semble plutôt délicat à aborder en Chine, mais le ton choisi est toutefois très politiquement correct. Déja que pour les films HK, la nécessité d'exportation vers la "mère patrie" a rendu les producteurs Hong-Kongais plus frileux sur des scénarios dès lors qu'ils traitent d'un sujet difficilement abordable en Chine (prostitution, triades, flic ripoux, fantômes...), mais également sur le ton général et la manière de traiter les sujets (morale finale douteuse ou injuste style "le méchant s'en sort à la fin", morts dans le film, etc...) ; c'est vous dire l'ambiance habituelle des films chinois. A World Without Thieves n'échappe pas à la règle mais aborde un sujet atypique malgré tout. Les personnages sont bien écrits, ceux d'Andy et de René sont plein de souffrances et de contradictions, Dumbo quant à lui est très attachant, il fait confiance en l'Homme et croit que la monde est a world without thieves.
René Liu est exellente comme à son habitude dans son rôle de voleuse repentie et Andy Lau qui incarne un voleur talentueux à la perruque style Bruce Lee, fait bien mieux que quelques semaines précedemment dans Yesterday Once More. Ge You (le joueur invétéré dans Vivre !) est également très bon, et ses hommes de main Gordon Lam (le deuxiéme ripoux, collégue d'Andy Lau dans Infernal Affairs) et Yong You (le bandit chinois, allié improvisé de Richie Ren dans Breaking News) le sont aussi.
Le film nous offre quelques scènes où les voleurs s'affrontent. Certains n'aimeront pas, car tout est filmé en gros plan ou en ralenti, mais ces "combats" de rasoirs (outil indispensable du pickpocket !) et de parades de prestidigitateurs sont assez originaux, et filmés sous la forme de ballets joliement choregraphiés. Tout ceci porté par d'agréables musiques à commencer par celle qui ouvre le film : "La vie en rose" ! La réalisation est plutôt simple mais s'avère interessante dans les scénes d'affrontements.
En Bref, malgré un ton assez sage, c'est une touchante et intéréssante histoire que celle de ces voleurs s'affrontant pour voler l'argent d'un pauvre bougre qui croît que le monde est A World Without Thieves. S'offrant une excellente René Liu (Taïwanaise) et un très bon Andy Lau (Hong-Kongais), la Chine montre qu'elle peut faire de bons films grand publics tout en gardant une éstéthique et une certaine tenue qui lui est propre. Un bon film à decouvrir.
Tout d'abord, le film met du temps à se lancer ; c'est assez long sur le début avec la mise en place des deux personnages principaux ; on reste un bon quart d'heure sans saisir où va le sujet avant de voir le train et donc l'intrigue réelle du film. L'avantage de cet inconvénient, c'est qu'il n'arrive qu'une fois dans le film ; en effet, tout de suite après on entre dans le vif du sujet et on plonge complètement dans l'intrigue, qui est vraiment délicieuse de malice. Par contre certaines scènes sont un peu lourdes sur leur mise en scène, comme les rencontres "musclées" entre les voleurs qui sont visuellement ambitieuse mais finalement un peu ratées. Par contre toutes les intrigue sur le duel entre les deux groupe sont vraiment prenantes et on ne peut pas s'en libérer. En outre, le point fort de ce film, c'est incontestablement Rene Liu, qui sublime devant la caméra et supplante vraiment son partenaire qui est pourtant très bon et amusant ; elle est touchante, naturelle, et loin de surfaire son rôle. Sinon, petite déception sur la fin où il n'était pas vraiment nécessaire de montrer la scène entre les deux chefs pour deviner ce qu'il s'était passé ; mais au final je garde un très bon sentiment de ce film, grâce à son très bon scénario et son actrice telentueuse.
A voir la coupe d'Andy Lau sur la jaquette et le côté plus "Chine Continentale" que "Hong Kong" de la production, il vient presque immédiatemment des préjugés assez classique au spectateur moyen: film chinois bien interprété, mais assez "froid", pour ne pas dire un peu ennuyeux, surtout comparé aux films bien plus "fun" du voisin Hong-Kongais. Sauf que la production chinoise évolue, et met à mal ces préjugés. A World Without Thieves est bien loin du drame rural ennuyeux, et se révèle être un divertissement de très bonne qualité.
Première qualité, le côté divertissement de haut niveau du film. On sent le budget comfortable, la volonté de faire un film équilibré qui sache divertir sans être complètement stupide. Le film alterne avec une étonnante facilité les moments graves et les moments nettement plus légers, à tel point que c'en est même un peu déroutant au début, à la manière d'un film HKgais de la bonne époque. Surtout que les moments plus "fun" se révèlent exagérés ce qu'il faut: les passes d'arme entre les pickpockets ressemblent beaucoup à du kung-fu, c'est certe très (trop) découpé au niveau réalisation, mais au moins original et vivant.
Ce côté film grand public n'handicape pas trop un scénario tout à fait correct. On sent tout de suite l'adaptation d'un roman, les dialogues sont bien écrits (avec beaucoup de métaphores sur les voleurs/loups), le lieu de l'action est original (un train de campagne où se mêlent voyageurs, voleurs organisés en "gang", wagon discothèque, brigade anti-pickpockets avec équipement hitech), les personnages sont écrits et intéressants. On évite ainsi la plupart des caricatures pourtant attendues dans une production chinoise importante (càd voleurs = méchants, policiers = gentils, gentils arrêtent méchants). L'interprétation souligne un peu plus la différence entre les acteurs Hong-Kongais "d'opportunité" dirons-nous, et les acteurs chinois de métier: Andy Lau se débrouille correctement, mais ne peut pas rivaliser avec un excellent Ge You et une épatante René Liu, sans parler du reste du casting qui se montre convainquant.
Techniquement, c'est également satisfaisant, même si la réalisation est un peu trop démonstrative de temps à autre (des ralentis un peu trop fréquent, du surdécoupage lors des scènes d'action). Mais il y a une vraie volonté de livrer de belles scènes, avec une photographie colorée, des décors naturels. La musique se montre également de très bonne qualité, même si elle est curieusement un peu trop absente lors d'un final hélas un peu décevant.
Outre ce final qui manque un peu d'éclat après une développement assez charmeur, on peut évidemment émettre quelques réserves sur la philosophie un peu trop gentille du film. Mais d'un autre côté le film parvient à être émouvant parfois, à la manière d'un bon vieux mélo des familles. Et la touche d'humour vient désamorcer toute tendance à se prendre trop au sérieux.
Au final, A World Without Thieves n'est pas un chef d'oeuvre, mais il parvient à surprendre, sur un sujet à la mode en ce moment (Johnnie To l'ayant déjà abordé avec Yesterday Once More et se préparent à le revisiter avec The Sparrow). Feng Xiaogang réussit à délivrer un film de voleur plaisant pour les gens à la recherche d'un divertissement, et sans sacrifier un petit fond un peu idéaliste et quelques originalités artistiques. Bon film tout simplement.
Il faut reconnaître que la maîtrise technique de cet habitué des comédies du nouvel an, est bien employée dans ce film. Certes, l'adaptation du roman a certainement beaucoup aidé au découpage des scènes, mais Feng Xiaogang sait maintenir un climat de tension tout au long du film sans avoir recours à une surenchère technique. Tout au plus peut-on trouver les effets spéciaux comme un peu plagiés (avec Andy à l'écran difficile de ne pas repenser à certaines scènes de La Voie du Jiang Hu). Mais encore une fois, celles-ci sont suffisamment bien intégrées pour ne pas faire tâche par rapport au reste de l'action. Tout ceci conduit à un film dense, porteur à la fois d'émotions, de suspens et d'action. Qui plus est l'interprétation tient du quasi sans-faute, Gordon LAM Ka-Tung venant compléter ce casting très équilibré. Feng Xiaogang avait déclaré vouloir voir avec ce film quelles étaient ses limites de cinéaste. Aucun doute, cette première tentative dans le "grand cinéma" lui ouvrira maintenant d'autres portes.
PS: avec ce film, La Voie du Jiang Hu, Le Secret des poignards volants et Yesterday Once More, 2004 constitue peut-être pour Andy Lau la meilleure année de sa carrière au niveau de la qualité des films interprétés.