Long... pour pas grand chose au final.
"The Go Master" est le genre de film typique, qui de part l'histoire et le sujet traité dans son scénario, aurait pu vraiment séduire un large public. Au lieu de ça, dès le premier quart d'heure, on commence à tourner en rond autour des faits divers du personnage principal, et on attendra de plus en plus que le film finisse vite. L'acteur principal est pourtant bon dans son rôle, dommage.
Tout de go
Le titre est trompeur: on n'y apprendra rien sur le jeu du go, et très peu de l'un des maîtres de ce fameux ancêtre du jeu d'échecs moderne, Wu Qingyuan, émigré chinois mieux connu au Japon sous le nom de Go Seigen.
Tian Zhuangzhuang revient timidement à des questions politiques après les neuf ans de "bannissement" loin des écrans pour avoir signé "Le cerf-volant bleu". Il choisit donc des reconstituer certains épisodes de la vie de Qingyuan en étroit lien avec la période trouble japonaise dans les années trente et quarante. Les parties stratégiques de Go reflètent l'avènement du conflit sino-nippon en Mandchourie; un tournoi se poursuit dans une maisonnée réduite en ruines suite à l'explosion de la bombe de Hiroshima. L'implication du maître du jeu à une communauté sectaire reflète plus largement l'actuel phénomène bien ancré dans la société contemporaine japonaise.
L'intention était louable, surtout que Zhuangzhuang tente de restituer la philosophie zen du jeu à travers une mise en scène minimaliste parfaitement adaptée, proche d'un cinéma de Hou Hsiao-hsien. Les magnifiques cadres de Wang Yu ("Suzhou River") sont épurés, les mouvements rares et posés et la Nature joue un rôle primordial, autant dans la composition des plans que dans le reflet de al tourmente des sentiments (magnifiques silhouettes en fuite des membres de la secte devant une mer de plus en plus déchaînée). Des textes écrits à même l'écran, se composant d'explications et de citations de l'autobiographie même du maître explicitent parfois certaines actions APRES avoir été montrées. Et même Emi Wada, l'une des plus célèbres costumières mondiales pour s'être illustrée par ses flamboyantes créations sur "Ran", Hero" ou – plus récemment – le coréen "The Restless" sait calmer ses ardeurs pour coudre des costumes plus ternes parfaitement adaptés au ton du film.
Dans le rôle principal, le jeune Chang Cheng ("Tigre et Dragon", "Happy Together" ou "Three Times") crève littéralement l'écran et confirme son extraordinaire habileté à changer de registre à chaque nouveau film. Un très, très, très grand nom en devenir!
Pourquoi le film ne réussit-il pas à décoller pour autant? Sans doute, parce que les louables intentions de son réalisateur n'atteignent pas tout à fait leur cible et que les différentes saynètes semblent quelque peu vains. Sans les explications suffisantes et – surtout – une structure épisodique, qui ne traduit finalement rien d'autre que des petits bouts de vie mis en parallèle avec les grands changements historiques, il manque une claire interaction entre les deux. Un joli exercice de style, mais trop appliqué et réfléchi pour totalement convaincre. Un honorable hommage au véritable maître (toujours vivant et apparaissant brièvement en ouverture du film, face à un Chang Cheng suspendu aux lèvres du maître), qui tiendrait plutôt du discours formel, que du témoignage d'un proche spontané et d'autant plus touchant.